Avec : Ji-tae Yu, Tae-woo Kim, Hyeon-a Seong, Ho-jeong Kim
Scénario : Hang Sang-Soo
Titre Original : Yeojaneun namjaui miraeda
Durée : 1:28
Pays: Corée du Sud, France
Année : 2004
Site Officiel : La Femme est l'avenir de l'homme
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Tirée d'un vers du Fou d'Elsa de Louis Aragon, l'affirmation « la femme est l'avenir de l'homme » sonne ironiquement dans le film du réalisateur coréen Hong Sangsoo. D'ailleurs, ce dernier juge ce vers vide de sens : « ces mots sont si banals, ils embrassent des sens si larges, qu'ils finissent par ne plus avoir de signification du tout. (…) Au bout du compte, le futur de l'homme n'est donc rien ».
De la même manière qu'il dissèque cette phrase, en étudie tous les possibles lexicaux pour les poser à côté, une fois son travail d'exégèse achevé, le réalisateur « vide ses plans », pour atteindre à une forme épurée. La mise en scène se révèle alors dans sa lumineuse simplicité. Pour autant, la structure filmique complexe n'est pas exempte de sophistication.
Avec un souci maniaque du détail, Hong Sangsoo place son intrigue du côté de la mémoire. Sa structure filmique rend compte de la part amnésique à l'œuvre dans ce cinéma du morcellement. En effet, le film se compose de fragments, à l'image de la mémoire, sélective et parcellaire.
Trois amis de faculté se retrouvent le temps d'un week-end. Les deux hommes ont aimé la même femme. Ils se souviennent les uns des autres, regardent rétrospectivement leur parcours personnel. Les souvenirs, les époques et les saisons s'entrechoquent et s'entremêlent. Le fantasme surgit dans ce réseau inextricable : le rêve et la réalité cohabitent.
Les retrouvailles passent par la réconciliation du passé avec le présent et des individus entre eux. L'un des hommes doit faire face à sa mauvaise conscience : il a abandonné la jeune fille à qui il avait fait promettre de l'attendre, pour étudier le cinéma aux Etats-Unis. Certaines scènes se répètent, comme dans la trilogie de Hong Sangsoo (La Vierge mise à nu par ses Prétendants, avec lequel ce dernier film dialogue), ou sont rejouées avec de légères variantes. Paradoxe que de la justesse qui se fonde sur une imprécision : celle du souvenir.
La jeune femme cède aux avances de ces deux anciens amants, avec lesquels elle couche successivement. Et le réalisateur de parler, au passage, de la soumission de la femme asiatique au désir de l'homme. Hong Sangsoo filme fort bien des scènes de sexe, témoignages de la subordination de la femme à l'autorité masculine. La femme doit obéir, c'est une loi ancestrale ! Les excès de boisson rejoignent une sexualité débordante. Tant et si bien qu'un des héros se plaint violemment de ne pas avoir assez dormi, en quittant brutalement sa maîtresse. Hong Sangsoo, c'est aussi cet humour léger, mâtiné d'ironie.
Le cinéma de Hong Sangsoo parle intimement de lui. Situés dans des milieux d'artistes et d'intellectuels, ces films comportent une large part autobiographique. Hong Sangsoo construit, en somme, une œuvre qui contient à la fois sa genèse et son point d'aboutissement : la représentation.