Les Conséquences de l'amour
Réalisé par Paolo Sorrentino
Avec : Adriano Giannini, Olivia Magnani, Toni Servillo, Raffaele Pisu
Scénario : Paolo Sorrentino
Titre Original : Le conseguenze dell'amore
Durée : 1:40
Pays : Italie
Année : 2004
Site Officiel : Les Conséquences de l'amour
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Avec son second long métrage, Paolo Sorrentino invente le cinéma-lounge-papier-glacé. Chaque plan des Conséquences de l'amour sent bon les pages d'un magazine de mode ou de design pour mobilier hôtelier haut de gamme, chaque scène (ou presque toutes) comporte un mouvement de caméra léché, si bien qu'on pourrait parler de cette œuvre comme étant le film aux mille travellings.
Pour emballer le tout, une musique digne des fins de soirées du Bouddha bar finit de conquérir le spectateur censé apprécier cet étalage de bon goût. Sorrentino témoigne d'un sens certain du cadre, de la perspective et de la composition, et ce, dès l'ouverture, où l'on voit un homme, traînant une valise, se laisser porter par un tapis roulant. Les diagonales fuient vers la ligne d'horizon, à la rencontre de cette silhouette silencieuse, immobile et mouvante à la fois, tandis qu'une douce voix à la croisée d'une Björk sage et d'une Emiliana Torrini enrouée chantonne sur un beat électro de salon. Ce générique contient et résume tout le film. Vous voulez de l'esthétique, vous allez être servi. Le problème, c'est que lorsque la technique d'une œuvre (une photo, une pièce musicale, un film) prend le pas sur son propos, jusqu'à monopoliser le devant de la scène, si à chaque plan, on ne remarque que l'agencement des éléments qui le constituent, et les mouvements de caméra, l'ensemble se trouve finalement réduit à un simple exercice de style qui tourne à la démonstration insipide.
Les Conséquences de l'amour raconte l'histoire d'un mystérieux pensionnaire solitaire et taciturne d'un hôtel. Elégant, mais toujours distant, voire antipathique et misanthrope, cet homme distingué semble pourtant cacher un secret. Un passé inavouable que le scénario s'attache à dévoiler, par petites touches. Le portrait s'enrichit au fil des scènes, jusqu'au final, forcément funeste. Cette histoire d'un comptable condamné par la Casa Nostra à rester enfermé dans un hôtel, loin de sa famille, et qui attend l'occasion d'apporter une fin rocambolesque à sa sinistre vie (sic) aurait peut-être pu prendre, racontée autrement. Noyée dans les gros plans sur les ampoules d'un couloir, ou sur la boîte de vitesse de la dernière berline de chez BMW, elle perd tout intérêt. Le sort de cet être brisé sombre alors dans l'indifférence la plus totale. A force d'aseptiser sa mise en scène, Sorrentino sert un emballage de luxe qui ne fera rêver que les amateurs de belles couvertures, avec au choix : de beaux costumes, une belle italienne au regard ravageur, une voiture rutilante, ou tout simplement de la photographie de publicité. Passé le sommaire, on tourne les pages brillantes du magazine, on cherche du texte, un article, une histoire. En vain.
Moland Fengkov
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