critique de Lying
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Présenté comme une œuvre expérimentale, ce film rend perplexe. A la limite du ridicule et de l'ennui, à mi-chemin entre happening arty inspiré et délire arrogant pour étudiants en cinéma ou en arts plastiques, on en sort comme d'un rêve dont on ne possède pas toutes les clés. Onirique donc, ce coup d'essai branchouille assume dès les premiers plans son esthétique éthérée, le rapprochant de Virgin suicides, de Sofia Coppola, dont il serait le lointain cousin bucolique. L'économie de moyen (caméra à l'épaule, équipe et casting réduits, unité de lieu : une maison perdue dans la campagne) et le soin apporté à la photographie témoignent d'une fraîcheur et d'une liberté créatrice consciemment pensée, mais rend l'entreprise suspecte. Le scénario, réduit à sa plus simple expression, semble servir essentiellement de prétexte à une performance formelle. Pour autant, le film ne laisse pas indifférent. Son univers vaporeux enveloppe le spectateur et ses images évanescentes l'accompagnent un peu à la sortie. Quatre jeunes femmes passent ensemble un week-end estival dans la maison de campagne de l'une d'entre elles, récemment héritière de la fortune de ses parents. Elles se connaissent à peine, communiquent peu, semblent chacune perdues dans leurs propres pensées, en proie à leurs démons intérieurs. La caméra mobile de Blash tourne autour de ces créatures désincarnées, glissant elles mêmes dans le cadre tels des spectres mélancoliques, drapés de fin tissus aux couleurs pâles et uniformes, qui virent au noir à la fin du week-end, après un passage au vert. Histoire de signifier l'expression de leur part d'ombre ? Au spectateur de voir là une quelconque signification. Ou non. Elles se meuvent en silence dans le cadre, dans la brume matinale ou dans l'ombre de la forêt. Tour à tour névrosés, cédant à des accès de larmes, et hystériques, notamment lors d'une séquence d'essayage de fripes, légère et futile, suivie d'une course désorientée à travers les pièces de la demeure, à la recherche de l'origine d'un chant de sirène, les personnages expriment une certaine vacuité à tourner en rond dans leur villégiature. Le film demande une période de digestion, lance le défi de se révéler après-coup, ou se dissout dans la mémoire, ne laissant que des images énigmatiques, comme cette scène où, en tenue de colonialistes, les filles se filment en train de nourrir de friandises des poupées représentant des bébés noirs. On hésite entre la crise de rire, la consternation et l'émerveillement.
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