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Tourné en noir et blanc, hormis pour la séquence d'ouverture, le film se construit à partir d'un long flash-back. Le montage, le rythme des différents épisodes, l'alternance de tons, les mouvements des personnages, ainsi que le sens des raccords témoignent d'une véritable maturité artistique qui confère à l'ensemble une certaine sincérité sans apprêt. On y croise plus de 600 personnages différents, dessinés par Satrapi et animés par une équipe au diapason de son style, au service d'une histoire réaliste chargée d'onirisme, influencée notamment par l'expressionnisme allemand. Servie par la voix off de Chiara Mastroianni (qui partage la distribution avec sa mère Catherine Deneuve), l'auteure livre ses souffrances, ses doutes et ses joies, avec dérision et modestie, témoin cette séquence où le personnage entame une chorégraphie improbable en massacrant Eye of the tiger de Survivor. Véritable œuvre de cinéma réalisée à l'ancienne, sans image de synthèse, qui évite le piège de l'adaptation utilisant la bande dessinée comme un simple story-board, Persepolis impressionne à bien des égards. Film pour adultes mais accessible aux jeunes générations, cet ovni dans le monde formaté des grands studios américains tend vers une certaine universalité. Le contexte historique et autobiographique permet de s'attacher au narrateur et à son parcours, mais soulève des questions qui dépassent l'anecdote. A savoir, comment trouver sa place dans un monde en mutation constante ? Etrangère dans son propre pays, parce que ses positions rebelles deviennent problématiques, étrangère dans un pays occidental dont elle ne comprendra jamais toutes les arcanes, la jeune Marjane s'interroge sur sa propre identité et, partant, renvoie le spectateur à sa propre vision du monde. Avec une simplicité affûtée, la jeune fille témoigne des bouleversements de sa vie et de la société dans laquelle elle grandit. Ou comment l'intime renvoie à l'universel. Du grand cinéma.
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