critique de Syriana
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Syriana s'inscrit dans cette ligne claire, qui fait de l'exploration des relations complexes avec le Moyen-Orient une vraie géopolitique filmique. Oeuvre composite, Syriana met en scène, de façon expressive, le choc entre différents blocs narratifs et physiques (Orient et Occident). Les enjeux économiques pétroliers s'agrègent à des manigances politiques qui n'ont d'autre visée que la prise de contrôle. Film sur le pouvoir et ceux qui le détiennent (les omnipotents hommes de l'ombre), valse incessante de pantins, éminences grises et mercenaires, toutes ces figures donnent à l'ambitieux projet sa dimension humaniste. Et de filmer la distance ténue qui sépare corrupteurs et corrompus, un jeune homme ordinaire d'un martyre pour la cause. Profondément démocrate, ce cinéma moraliste, minoritaire aux Etats-Unis, s'adjoint la même équipe de producteurs que sur Good Night and Good Luck de l'impeccable George Clooney qui campe ici un homme de main affranchi, rattrapé par ses convictions progressistes. Mais là où Clooney réalisateur ne dépassait pas le film d'intervention, Syriana fait le constat tragique de sa propre impuissance. Processus irréversible que la déliquescence mondialiste, machine à broyer des individus épris d'idéalité, qu'enregistre Stephen Gaghan sans faire de son long métrage un porte-étendard. Syriana ou une intelligence cinématographique en actes.
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