The Deep End est un des films les plus engageants d'un été assez médiocre. Le lac Tahoe s'avère être un décor parfait pour ce thriller aux tonalités bleuâtres, remplaçant l'obscurité et la noirceur urbaine par la tranquilité de l'eau et de la forêt. Combiné à une distribution solide et une attention particulière aux détails, c'est un film qui s'appréciera d'autant plus avec le temps.
Tilda Swinton interprète Margaret Hall, un mère qui essaye de sauver son fils adolescent Beau. Lorsque l'amoureux homosexuel de celui-ci, patron glauque d'une boite de nuit de Reno, est retrouvé mort sur les rîves du lac, Margaret fait ce que toute mère qui se respecte ferait. Elle traîne le cadavre dans un bateau puis le jette au milieu du lac Tahoe. Bien qu'elle ne sache pas ce qui s'est exactement passé, l'hypothèse que son fils est responsable et les actions qui s'en suivent font qu'aucun retour en arrière n'est possible.
Entre élever ses trois enfants seule (son mari est parti en mer), vaquer à ses occupations, et s'occuper de son beau-père, elle doit répondre aux questions anodines de la police lorsque le corps est découvert. Et si ce n'était pas assez, Alek Spera (Goran Visnjic) entre en scène pour lui faire du chantage. Il lui montre un vidéo de son fils et de son amoureux et lui fait une proposition: contre la somme de $50.000 délivrable sous 24h, il détruira la cassette. Margaret a plus d'une raison de se débarasser de ce film encombrant, outre la suspicion que son fils est coupable. Beau est d'abord un musicien doué plein d'avenir. Deuxièmement, son mari qui est militaire ne comprendrait pas les inclinations homosexuelles de son fils. Enfin, cela nuirait à la réputation de famille.
L'attention aux détails fait le succès de ce film. En l'observant passer sa journée à laver le linge, s'occuper des enfants tout en tentant de réunir une grosse somme d'argent, on a une image plus claire de Margaret. Vous ne la verrez pas arriver avec des sacs plein de billets puis pulvériser son maître-chanteur. Au lieu de cela, vous voyez une femme qui suit son instinct mais oublie des détails importants. Après s'être débarrassée du corps, elle se rend compte que la voiture de la victime est garée devant chez elle et qu'elle doit aller en récupérer les clés dans les poches de celui-ci au fond du lac. Pas mal non?
Rien ne marche comme prévu. Sombre mais avec un bon fond, son maître-chanteur Alek devient son ange gardien et une relation étrange empreinte de confiance se développe entre les deux avant de s'achever dans la souffrance.
Le film est certainement une ode aux femmes. "C'est une mère, pas une idiote", dit l'amoureux de Beau à celui-ci au début du film. Les fils sous-estiment souvent la force de leur mère. Et la fille adolescente de Margaret n'est pas en reste non plus puisque c'est elle qui répare la voiture familiale et non le grand-père ou le grand-frère. Elles font les ajustements que la vie nécessite, pour le meilleur ou pour le pire.
Le milieu social est aussi un thème prépondérant. Aller en vacances à Reno semble aussi attrayant que d'aller visiter le Bronx. On l'évite à moins que ce soit vraiment nécessaire. Et quand des personnes venant de Reno envahissent sa maison, ce n'est que pour apporter la corruption et le vice. Non que le lac Tahoe n'ait pas sa part de criminalité, il suffit de voir la fin du Parrain II pour comprendre.
L'eau est naturellement un élément crucial du film. Le lac Tahoe est filmé avec une grande beauté, bien que ce qui y flotte soit d'une toute autre nature. Quand son beau-père a une crise cardiaque, la bombonne d'eau qu'il portait se brise pour se répandre autour de lui. Lorsque Margaret est dans la piscine elle voit pendant un court instant le visage de l'homme qu'elle a jeté au fond du lac. On n'imaginerait pas aller à la piscine après un tel acte, mais dans son désir de retourner à la normalité, elle en oublie ses émotions.
L'interprétation est de qualité. Visnjic est excellent en maître-chanteur sensible, tandis que Swinton mérite d'être nominée pour un Oscar. Chacun se nourrit de la performance de l'autre et tous deux possèdent une élégance certaine dans leur vulnérabilité.
Récit à suspense admirablement filmé et qui vous tient en haleine, The Deep End doit être évité par ceux à la recherche d'un film facile.