The Unforgiven critique de The Unforgiven



 

 



The Unforgiven review

The Unforgiven

:. Réalisateur : Yoon Jong-bin
:. Acteurs : Jung-woo Ha, Sung-chun Han
:. Scénario : Yoon Jong-bin
:. Titre Original : Yongseobadji mothan ja
:. Durée : 2 :06
:. Année : 2005
:. Pays : Corée du Sud


Tae-Jung et Seung-young sont amis d'enfance, leur parcours scolaire a fait que le premier s'est présenté avant au service militaire de vingt-six mois dont doit s'acquitter tout coréen. Cela n'aurait pas entaché leurs retrouvailles s'il n'existait un code tacite se superposant à la hiérarchie, celui de l'ancienneté. Ainsi, tout nouvel arrivant subit les brimades de ceux qui l'ont précédé. Seung-young, protégé par Tae-jung, s'élève contre ces harcèlements sadiques mais lorsque ce dernier retourne à la vie civile ses rapports avec son ouaille empotée Ji-hoon s'altèrent. S'ensuit un malaise et, lors d'une permission, il cherchera désespérément à rencontrer Tae-Jung.

Délicat sujet pour un premier long-métrage que l'exploration des contreforts obscènes et moraux des comportements sociétaux. C'est pourtant sur ce chemin que s'engage avec hardiesse Yoon Jong-bin. Le choix d'une structure temporelle morcelée et centrifuge instaure une dimension réflexive d'autant que le drame se noue dans une ivresse nocturne tendue - culpabilité et cruauté s'agrègent placidement. Quelle part accorder à la liberté individuelle et à la responsabilité de son exercice ? En quoi le canevas proposé est-il inhérent à la formation d'un conscrit ? Autant d'enjeux presque philosophiques qui travaillent en creux la mise en scène pour bientôt faire basculer les protagonistes.

Seung-young possède la particularité d'évoluer du statut de novice idéaliste à celui de bourreau hagard sans que pour autant cette mutation s'inscrive physiquement sur lui. Il finit simplement par se fondre dans le moule en cautérisant ses principes. La gageure du film est alors de brocarder le cheminement qui va le conduire d'un extrême à l'autre. Cette piste nébuleuse et rectiligne qui broie les plus faibles et oblitère les insurgés, le cinéaste ne la retranscrit pas seulement par une attention aux détails mais par une juxtaposition bondissante et métronomique de l'infime et du tout. La première scène est à ce titre édifiante puisque nous passons du ciel fixe à l'oreille du jeune homme, puis à son doigt avant d'en retrouver le corps entier et enfin à nouveau les nuages.

Le concept narratif révèle sa puissance lorsque le burlesque s'estompe (pantomimes et houspilles hilarantes, matricule ânonné) et que le questionnement déontologique resurgit : en vase clos les individus savent indubitablement à quoi aboutit leur participation au processus de soumission, point de rédemption ou de repentance. Prospecter les méandres de la psyché d'un peuple sans jeter de manière manichéenne l'opprobre sur les êtres nécessite une véritable empathie, une fusion que seule la durée peut interjeter, animer.

Or c'est exactement la qualité première du baroque The Unforgiven que de s'étirer pour atteindre une envergure insoupçonnée. Il accompagne le spectateur grâce à deux caractéristiques louables. Déjà sa magistrale peinture de la temporalité où les ellipses béantes - évidements constants ou sporadiques - déconstruisent les consciences pour accentuer l'éreintement devant le défoulement soudain des vétérans. Mais surtout l'apposition des sphères de perception grâce au fond sonore. Déplétions sensorielles, les rumeurs du monde vrombissent pour finalement insuffler la véracité abhorrée par l'image : discussion au lit traversée par des gémissements d'une chambre voisine (homosexualité refoulée ?), marche nocturne et bruit du trafic (refuge inexistant), décor sylvestre et détonations (innocence pervertie), ascension vers le suicide et gazouillements (libération séraphique, le faible d'esprit seul y accède) ou enfin bruit d'écoulement d'eau et gouttes de sang (flux implacable). Par là, Yoon Jong-bin fustige l'inconséquence de règles iniques aliénant les rapports humains. Et son pamphlet d'ondoyer au-delà du microcosme métaphorique de la caserne par le plan final, âpre et sincère - nouveau point de vue d'une scène antérieure. Des chaises et un banc ankylosés, ils se font face - empreintes pétrifiées d'espace -, inconsolables au vu des drames qu'ils ont étreints, d'autant que la pluie lacrymale s'entête, invoquant le besoin de comprendre.


  Frédéric Flament


    


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