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Un homme, un vrai













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Un homme, un vrai
Réalisé par Jean-Marie & Arnaud Larrieu

Avec : Mathieu Amalric, Hélène Fillières, Pierre Pellet, Philippe Suner
Scénario : Jean-Marie Larrieu & Arnaud Larrieu
Durée : 2:01
Pays : France
Année : 2003
Ou « Comment on n'en fait plus des comme ça »

Les deux films d'entreprise servant de prologue et de conclusion au long-métrage des frères Larrieu, pirouetteraient-ils sur le thème : « Quoi de plus audacieux aujourd'hui que la grande aventure de la monogamie ? » Avec en contrepoint les grandes découvertes et les voyages au long cours sur terre, sur mer et en montagne qui forment — dit-on — la jeunesse et, selon ces mêmes frères Larrieu, poussés à l'air frais des Pyrénées, l'homme de la Renaissance amoureuse. À la fois mari, père et amant, c'est le Vinci de la famille moderne, l'homme à tout faire qui jongle avec les maladies infantiles, la terreur de la page blanche et une executive woman « frequent flyer ».

Trois actes pour cette carte du tendre à géométrie variable : la rencontre, la vie puissance² avec progéniture puis la séparation qui augure, comme souvent les histoires d'amour exemplaires, de retrouvailles sur les neiges éternelles. Les deux premières périodes durent cinq ans. Quant à la dernière, bien malin celui qui pourrait prévoir sa durée.

Boris rencontre Marilyn, donc, qui elle-même rencontre Boris. Coup de foudre dans le 11ème arrondissement. On pourrait rire de ces prénoms tant ils forcent le traits et sont improbables. Mais à tout prendre, ils sont parfaits. Car pour cette danse et ce chant de séduction, mieux vaut deux icônes : un prénom de star et un prénom de tsar. Les mêmes lettres mais des alchimies singulières qui se dominent l'une, l'autre, alternativement à la période des amours.

Une histoire de brèche donc (de Roland ou non) qu'on colmate à grands coups de résignation avant qu'une formidable poussée d'oxygène ne vienne tout faire exploser dans une avalanche de moi, moi, moi. Et de traîner là-haut, sur les verts alpages du célibat, un énorme sac à dos et un gros poids sur la patate.

Et c'est cette merveilleuse adéquation entre fond et forme — tant au niveau du scénario que du montage — qui ravit littéralement le spectateur, ébahi de la sophistication élégante et limpide du film.

Clins d'œil et pieds de nez aux comédies musicales, images d'Épinal de la rencontre magique de deux êtres appelés à s'aimer, les Larrieu s'amusent à souligner la mécanique de la séduction où chacun essaye d'échapper au rôle écrit pour lui. Coqs et poules, Carmen, balais et alcool, tout est volontairement montré à l'envers de manière à réinventer et à improviser l'amour et sa magie : rôles intervertis (lui s'occupe des enfants, elle fait bouillir la marmite), rupture au cours des vacances (moment théoriquement consacré à se redécouvrir), et réunion autour de leur deux métiers (exactement comme au début du film).

Et une fois sa verticalité symbolique ou réelle révélée (des personnages qui tentent de se dépasser ou d'atteindre de vrais sommets), le film prend son envol : de la varappe de Boris près de la piscine, avec en arrière-plan une mer bleue, infinité aquatique non domestiquée et redoutablement attirante, jusqu'à l'escalade des belles Pyrénéennes, c'est une savoureuse succession de fugues amoureuses vers les cimes et les grands espaces.

Et c'est dans les montagnes justement, puis dans un aéroport (autre lieu d'élévation) que Marilyn et Boris se retrouvent. Se retrouvent sans se le dire. Les prénoms ont changé : ils sont plus courts ; moins d'illusion, plus de matière. Nouveaux noms, nouvelles langues, l'anglais et les cris kusturiciens des coqs de bruyère, nouveaux métiers. Les cheveux courts pour elle et la barbe pour lui seraient-ils les seuls remèdes à l'atonie de la monogamie ? Parlant d'eux-mêmes à la troisième personne, ils n'évoqueront jamais directement cette chose essentielle qui les unit et n'a pas de nom.

Alors un vrai film français sur la liberté dans le couple qui ignore savamment égalité et fraternité. Elle, épatée qu'il soit devenu guide de montagne (« Guide de montagne » c'est un métier dangereux ça… ») comme si à présent, ils ne pouvaient plus se perdre.

  Corinne Le Dour Zana





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