Avec : Audrey Tautou, Gaspard Ulliel, Albert Dupontel, Jodie Foster Scénario : Guillaume Laurant Jean-Pierre Jeunet Durée : 2:14 Pays : France Année : 2004

C'est officiel : les fiançailles sont consommées entre le cinéma de Jean-Pierre Jeunet et son actrice, Audrey Tautou, désormais incontournable. Sont venus en masse les invités de cette cérémonie ouverte à tous, à l'exception de quelques critiques professionnels, qui durent pour leur part attendre l'after, quand tous les autres avaient déjà la gueule de bois et la larme à l'œil. Faut-il faire la fine bouche devant ce qui s'annonce d'ores et déjà comme le plus gros succès frenchy de l'année sous les couleurs de la " Warner Bros. " ? Oui. Pas de quoi se mettre en colère, c'est gentil tout plein, mais quand même, se dire que décidément, le lifting " France d'avant " a encore de beaux jours devant lui. Passé maître dans l'art de " photoshopiser " ses plans, Jeunet reconduit la qualité française¹ comme il ferait l'argenterie d'une vieille tante. Résultat, un étrange paradoxe vous tient en haleine d'un bout à l'autre de ce Long Dimanche de fiançailles : comment une fresque réalisée à coups de dollars bien placés (pas moyen de voir un personnage plus de deux minutes sans y reconnaître quelqu'un de connu) peut-elle à ce point donner l'impression de tenir tout entier dans l'espace étroit d'un théâtre de poche ?

Du cinéma vide-grenier à faire pâlir d'envie les chineurs de brocante, et une fois de plus l'imaginaire indéboulonnable d'une France qui d'une guerre à l'autre, a mis son éternel scénario aux enchères : est-ce que l'âme française² , cette inquiétante chimère, peut faire la différence ? Jeunet a placé l'enchère assez haut cette année pour remporter la timbale, mais force est de constater qu'il y aura toujours des suiveurs. Et plus le cinéma français saura garder son rang dans le grand bain technologique, plus cette histoire nous sera, encore et toujours, racontée. C'est là qu'il y a de quoi s'inquiéter. Dès que ce scénario fait retour, dès qu'il s'agrège à d'autres succès pour nous bassiner à coup d'imaginaire national, on sait que le cinéma, lui, n'est pas près d'avancer.

¹ Et son fond de commerce " Deschiens " normalisé…
² Fût-elle humaniste : ce scénario idéal, au fond, reste celui des Visiteurs du soir de Marcel Carné, où le cœur des amants, contre vents et marées, battra toujours français.

  Sébastien Bénédict

     Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain