Wiltern Theater, Los Angeles13/06/99
LOS ANGELES, Californie- Ole Tomcat Waits était aux aguets en ce dimanche soir au théatre art-déco Wiltern. Pour le second de ses 3 concerts à LA, dans le cadre du mini tour de 5 dates qui ensuite partira pour l'Europe, Waits a montré qu'il est l'un des derniers musiciens authentiques, à en juger la chaleur et l'intimité qu'il réussit à créer dans cette salle de 2200 personnes.
Il fît connaître sa présence avant même d'entrer en scène. Vociférant dans un mégaphone rouge, notre épouvantail illusioniste entra par le côté, affublé de ses habituels costume et chapeau mou à 7$. Marchant d'un pas lourd, jetant ses cotillons magiques dans la foule en rugissant avec une chaleur si particulière, il fît son entrée comme si il était chez lui. Un enthousiaste "Black Rider" ouvrit les hostilités, avant de passer à un "Singapore" plus clinquant. Waits offrit une bon évantail de ses chansons tirées principalement de ses 4 derniers albums et bien sûr, "Mule Variations" avec le bluesy "Get Behind the Mule" et l' émouvant "Hold On". Il laissa aussi le prêcheur qu'il a en lui exulter sur "Jesus Gonna Be Here Soon", donnant à Robert Duvall (The Apostle) la monnaie de sa pièce. Le swami du bayou n'eut même pas besoin de charmer des serpents pour faire de ses spectateurs de fervents croyants.
Waits et son groupe de premier ordre (Smokey Hormel, Larry Taylor, Andrew Borger, et Dan Magough) joua en totale symbiose pour un show au blues rugueux. Waits passa la plupart du temps en avant, martelant le sol de son pied comme une mule, agitant ses bras comme un magicien qui aime être enchanteur.
Il créa une ambiance sombre et presque effrayante pour son morceau-parlé "What’s He Building?" de Mule Variations, à propos d'un de ces voisins étranges et solitaires comme nous en avons tous, qui reclus derrière sa porte traffique on ne sait quoi. Ensuite il gravita jusqu'au piano pour une série émouvante de chat dans la gorge dont le mélancolique "Hang Down Your Head", l'accueillant "Come On Up to the House", "Picture in a Frame", et l'entêtant "Innocent When You Dream" qui me surprit chanter à l'unisson avec Tom Waits et le public pour la première et dernière fois.
Cette émotion sauvage et cette candeur furent tempérées par son côté comédien, alors qu'il partagea quelques exploits tirés du livre Guinness des Records, ses observations sur les rues de LA, et ses blagues bancales dont seul il peut tirer des rires. Son timing est impeccable, et plus d'un comedien de LA devrait y prendre note pour son compte. Il fit aussi apparaître "Man With Drink" (L'homme au verre). Man With Drink est à l'image de son nom, un serveur qui amena sa boisson à Mr. Waits sur un plateau d'argent. Est-il nécessaire d'en dire plus?
Le talent de Waits en représentation est qu'il a un sens inné de la scène en tant que musicien, mais aussi que comédien, une qualité rare dans le rock. Chaque son, mouvement est bien pesé. Et vous savez que si il prend la peine de le faire, chaque seconde le vaudra. Il y a une différence quand quelqu'un chante parce qu'il a en envie et pas seulement parce qu'il (elle) cherche l'attention. La lumière, dans les bleu et jaune, donna l'impression que le groupe jouait dans votre jardin ou dans un aquarium. Une chose est sûre, cela contribua à plus d'intimité.
Voir Waits sur scène est une sorte de rite d'initiation dans un culte aux croyants aussi détendus que passionnés. La plupart des spectateurs ressemblaient à des vieux de la vieille, vieux fans qui avaient attendu ce show depuis longtemps et l'appréciaient d'autant plus. Ils viennent d'un peu partout, ont dans les 40 ans, issus de la classe moyenne et se foutent pas mal d'avoir l'air cool ou non. Une femme (dans le rang nez pincé) demanda combien il fallait payer pour être au premier rang. "Des centaines de $" répondit son copain. "Oui mais comment les riches peuvent-ils aimer Tom Waits?" rétorqua-t-elle. Bien dit.
Waits termina avec sa préférée: C'était "Time, time, time", le temps d'y aller en effet.
Anji Milanovic
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