critique du film 2046 DVD 20462046 Critique du film [2046]






2046













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2046
Réalisé par Wong Kar-Wai

Avec : Tony Leung, Zhang Zhun, Faye Wong, Takuya Kimura
Scénario : Tony Leung
Titre Original : 2046
Durée : 1:55
Pays: Hong-Kong
Année : 2004
Site Officiel : 2046
Oeuvre nostalgique et stylisée, travaillée en creux par le temps, 2046 s'inscrit dans la continuité esthétique et thématique de In the Mood for Love, son film jumeau. Le dernier métrage de Wong Kar Wai prend naissance dans un espace flou, à la fois futuriste et rétro, où les souvenirs se heurtent aux regrets. Le réalisateur sonde cet espace mental, traversé de zones d'ombres, de rêves, d'espoirs déçus. En somme, il explore l'imaginaire et la mémoire de son héros, un écrivain de science-fiction qui, autrefois, aima follement une femme.

2046 s'ouvre sur une séquence numérique, étonnante dans l'univers du cinéaste : un train mystérieux emmène des voyageurs, en quête de leurs souvenirs perdus, en 2046, espace-temps dont personne ne revient. A part le héros qui entreprend un intime travail de remémoration. Différentes femmes, croisées au hasard d'une existence solitaire, habitent l'espace de ses souvenirs. Ces brèves histoires d'amour, intenses et désabusées, sont relatées tour à tour, formant des blocs narratifs sédimentaires, des strates mnésiques qui se croisent et s'entrechoquent. Les très belles héroïnes de Wong Kar Wai (Zang Ziyi, Gong Li, Faye Wong) incarnent divers pôles de la féminité. Passionnées, cérébrales ou romantiques , leur présence rend encore plus criante l'absence de l'idéal féminin, enfoui et perdu à jamais dans les tréfonds du passé et les méandres douloureux du souvenir. 2046 est un film sur la solitude et l'absence, thèmes qui traversent, comme une nébuleuse, l'œuvre du cinéaste.

Maggie Cheung, sublime héroïne de In the Mood for Love, pourtant créditée au générique de 2046, brille par sa présence/absence, tant à l'image que dans l'existence du personnage principal. Contaminant tout l'espace diégétique, cet absolu féminin vit dans un endroit indéfini où sont stockés les pensées les plus personnelles du héros. Peut-être bien ce 2046 du titre, qui est aussi une chambre d'hôtel. A moins que ce ne soit ce secret fiché dans le flanc d'une montagne cambodgienne, épisode qui intervient dans l'épilogue de In the Mood for Love et qui est relaté par le héros lui-même.

Des correspondances traversent de part en part les deux films miroirs. Des jeux d'échos s'établissent : tout comme dans In the Mood for Love, la circulation des objets d'un plan à l'autre (clés, robes, accessoires divers) accompagne le récit, infléchit sa direction et oriente le regard. Ces éléments agissent comme autant de bornes temporelles et narratives pour le spectateur. Wong Kar Wai invente un cinéma fétichiste. Mais l'érotisme délicat de In the Mood for Love est sérieusement édulcoré, au profit de scènes de sexe plus explicites. Sensuelles, certes, mais chargées de désespoir. La relation très incarnée que l'écrivain entretient avec une de ses maîtresses (Zang Ziyi) tourne au duel sensuel, à un jeu de dupes où les véritables sentiments resteront silencieux. Cruel, ce segment est compensé par un autre plus tendre qui voit l'osmose intellectuelle entre l'écrivain et son assistante.

Mais qu'est-ce donc que 2046 ? Une abstraction désabusée sur les tourments de la solitude affective ? Un film expérimental qui met en regard la mémoire et le temps ? Ou, plus sévèrement, un calque un peu terne du film précédent du réalisateur ? On penche malheureusement pour cette dernière proposition. Moins envoûtant que sa matrice originale, 2046 ne réussit pas ce rapt intérieur qui participait de la magie et de la beauté de In the Mood for Love. A la patine de ses décors, répond l'usure d'un regard qui ne se trouve pas régénéré par l'expérimentation, bien au contraire. L'impression de « déjà vu » prévaut. Dès lors, la démarche interroge. Quel est le sens de ce sequel ? A t-il été motivé par de pures préoccupations artistiques ou s'agit-il d'une facilité commerciale ?

  Sandrine Marques

     Eros





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