Pour un Garçon
Réalisé par Chris & Paul Weitz
Avec : Hugh Grant, Toni Collette, Rachel Weisz, Isabel Brook
Durée : 1:40
Pays : USA
Année : 2002
Web : Site Officiel
Basé sur : Roman
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Dans Pour un Garçon, Hugh Grant s’en sort bien, et ce, pour deux raisons: premièrement, l’auteur Nick Hornby a apparemment écrit le personnage de Hugh Grant avec celui-ci en tête, étant donné la perfection avec laquelle il incarne ce charmeur; deuxièmement, pour une fois, il n’use pas de ses charmes évidents pour conquérir une Américaine à la chevelure abondante. Au lieu de cela, c’est lui qui est conquis par un enfant sans ami, flanqué d’une mère suicidaire. L’absence de la coiffure exagérément soignée de Hugh Grant est aussi une amélioration bienvenue.
Voici donc les prémisses de l’un des duos les plus improbables de la littérature/cinéma. Hugh Grant incarne Will, un Peter Pan de 38 ans qui n’a jamais grandi parce qu’il n’en a jamais eu besoin. Il aime prétendre qu’il est comme une île; les gens (en général de jolies filles) passent mais personne ne s’y attarde trop longtemps et ça lui plait bien comme ça. Surviennent alors un évènement quasi-tragique et un mensonge bizarre, qui vont s’installer pour de bon sur cette île, avec Marcus, un garçon de 12 ans qui a énormément de mal à être un enfant. Comment pourrait-il en être autrement, avec pour mère une hippie suicidaire et ignorante (Toni Collette, une Fiona toute en larmes et angles droits). Dans un premier temps, Marcus fait de Will un petit ami potentiel pour sa mère, mais il se rend vite compte que Will est bien plus doué pour lui apprendre à être un enfant. Et bien entendu, une leçon de responsabilité adulte sera inculquée à ce béta de Will par la même occasion.
Alors que le roman faisait la part belle entre les deux personnages, le film met plus l’accent sur Will que sur Marcus. Il fallait s’y attendre, quand on a un gosse aux dents pourries en sweat-shirt bariolé d’un côté, et Hugh Grant de l’autre, ses yeux bleux plissés par le sourire plus que jamais. Malheureusement, on a dès lors plus de mal à faire la connaissance de Marcus et Fiona. Un petit déjeuner rapide et le chemin de l’école ne suffisent pas à nous présenter une relation mère/fils. Pourquoi Fiona est-elle si triste? Qu’en est-il du père de Marcus? Et ce ne sont pas ces quelques minutes de scènes de cour de récréation qui vont nous faire ressentir le désespoir Marcus face aux brimades infernales dont il est la victime, ni son béguin pour l’intimidante Ellie et ses dreadlocks, choses que le roman décrivait à merveille. Ces détails sont sacrifiés sur l’autel des commentaires auto-désapprobateurs (et satisfaits) de Will, et ses séances de shopping.
On a donc, au lieu d’une étude plus profonde de personnages effectivement plus profonds, Hugh Grant dans le rôle de Will, et l’on n’y perd presque pas au change. Végétarien couard s’exprimant en métaphore, il semble que Hugh Grant ait passé toute sa carrière à attendre ce rôle. Il troque son légendaire sourire confus contre un égoïsme et une paresse méprisables, et l’on comprend malgré tout toujours que Will soit le genre de mec qui peut séduire la première femme venue, juste après avoir été giflé par une autre. Sa complaisance dans le côté léger de la vie est contagieuse. Qui d’autre pourrait dire que suivre une ambulance à toute vitesse est le meilleur moyen de conduire à l’hopital un enfant dont la mère a ingurgité un flacon de médicaments.
Cette brillante performance de Hugh Grant – charmant, mielleux et assez drôle en même temps - ne fait pas de Pour un Garçon un grand film. C’est parfait pour un jour où vous avez besoin d’un film dont vous savez qu’il se termine bien. Damien Gough (Badly Drawn Boy) produit une bande originale au rythme idéalement entraînant, et les frères Weitz montrent qu’il y a une vie après l’humour pipi-caca. Mais les moments d’humour absurde – comme celui mettant en scène un canard et une très grosse tranche de pain - sont tempérés par des moments trop prévisibles (les héros de films doivent-ils toujours courir très vite à la fin pour sauver la situation?).
La fin – heureuse, cela va sans dire - du film nous révèle la bouille souriante de Marcus. Cela dit, après deux heures en compagnie du faciès de Hugh Grant, on sait de quel garçon il s’agit dans ce film.
Laura Tiffany Traduit par Christophe Gouveia Roberto
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