critique de Entre Deux Rives
|
Le challenge du film réside intégralement dans la viabilité de son dispositif épistolaire instillant une matérialisation temporelle prégnante. Le scénario, orbe habile, attise immédiatement l'intérêt par quelques situations cocasses ou le gargarisme satisfait d'un raffinement esthète - l'architecture comme art moderne par excellence. Le spectateur embringué dans les effluves aqueuses d'un candide divertissement en tolérera d'autant moins la dissolution dès que le réalisateur entend contrevenir à son propre axiome (enjeu de l'attente pour fouler concomitamment le plan) en orchestrant des rencontres virtuelles pour le couple. Une romance banale et butée s'imprime dès lors sur une image en jachère pour en laver les fugitifs émois et ne perdure qu'un assortiment de deux stars usées aucunement plausibles en amoureux transis. Les seconds rôles amidonnés dans leurs postures cathodiques (Nip/Tuck ou 24) ne ravivent pas plus l'intérêt. Alejandro Agresti voudrait réitérer l'alchimie fulminante de Speed mais le manque de conviction patent d'un Keanu Reeves bien las ou d'une Sandra Bullock égarée dans de coupables accointances avec le pire du gynécée hollywoodien sape toute once d'originalité ou de complexité à l'intrigue. Alors que les scènes apathiques s'amoncellent, nous sommes invités à nous extasier sur l'insolite bâtisse sur pilotis au bord du lac. Enthousiasmante trouvaille visuelle façon Hopper le bâtiment ouvert aux yeux de tous devient une formidable allégorie de la psyché des protagonistes - mais aussi du récit - flottant entre les époques sur des bases ténues. Le décor participe ainsi grandement à instaurer le vécu des protagonistes et la sensation, maintes fois commentée par les sociologues américains, de l'isolement dans la transparence. Rageant que le reste du film ne soit pas à l'avenant.
|
|