La Tourneuse De Pages movie review DVD critique de La Tourneuse De Pages



 

 



critique de La Tourneuse De Pages

La Tourneuse De Pages

:. Réalisateur : Denis Dercourt
:. Acteurs : Pascal Greggory, Catherine Frot
:. Scénario : Denis Dercourt
:. Durée : 1:25
:. Année : 2006
:. Pays : France


Mélanie Prouvost, jeune fille de boucher s'apprête à passer le concours du Conservatoire. Elle débute brillamment son interprétation mais l'attitude cavalière de la présidente du jury, Ariane Fouchécourt, la liquéfie. Recalée, la fillette abandonne son art et entame une patiente vengeance qui culmine dix ans plus tard lorsqu'elle pénètre le domicile de son pervers bourreau en tant que baby-sitter. Rapidement son sens musical séduit Ariane qui, fébrile et vulnérable, recherche une tourneuse pour un concert capital. La mise à mort peut s'enclencher.

La qualité principale et mouvante de La Tourneuse de Pages réside indéniablement dans son rythme qui emprunte la prosodie d'une pièce musicale - tempo omniprésent (claquement de portière, manoeuvre ternaire du prédateur ou oscillation d'un personnage à l'autre). Nous sommes enjoints à traverser des passages de sourde harmonie pour qu'un accord strident nous perce finalement le cœur (piscine ou cache-cache). La caméra furète, rêche et feutrée, entre naturalisme et volupté refoulée pour mimer cette translation de tension à brusque détente. Jusqu'à se réapproprier l'image et le succube afférent qui déclinaient dans une fronde glacée (couleurs pures et froides, visage buté et séraphique). L'ouverture du film valait en effet pour l'ambiance sonore enveloppant Mélanie - représentation graphique brouillée - après 1h25 de dissidence, la musique submerge à nouveau le cadre suite à l'effondrement d'un corps anéanti pour exploser dans un orgasme tonitruant et inendiguable tandis que le monolithe de haine recouvre son univers passionnel.

La mise en scène sans envergure (ralentis timorés, monotonie et étroitesse heurtée) pâtit de l'obédience mélodieuse du cinéaste qui s'ingénie à capter l'effacement des êtres et des enveloppes au profit d'une pure tonalité (violoncelle abattu comme un couperet). La peinture physique s'apparie dès lors difficilement avec l'atmosphère anxiogène et clinique à laquelle l'œuvre aspire. Il s'agit de tourner autour des protagonistes ou du sujet comme Mélanie change la page de la partition devant sa victime transie. De fait, les chairs se refusent à la lumière (essayage et poitrine entraperçue). L'acte tactile est le seul qui intéresse le réalisateur (âpreté du travail, délicatesse d'un clavier ou d'une main énamourée que l'on frôle), pour le reste il se meut en thanatopracteur agençant son théâtre forclos et moribond hors du temps et de l'espace. Et le trouble de naître de l'ancrage pathologique dans une réalité tangible (repas, gare miteuse, salle d'enregistrement élimée, murs craquelés…).

A force de soigner sa creuse tessiture, le soliste Denis Dercourt oublie d'incarner son drame intimiste et ondoyant si ce n'est une lénifiante tentative d'achoppement de deux strates sociales antagonistes. Frigide et saphique, la duplicité engagée n'émeut aucunement et la performance de Déborah François (L'Enfant) a beau être magistrale, elle subsiste difficilement dans ce cocon léthargique et duveteux.

L'expérience discursive amadoue surtout par les déambulations impavides de Mélanie, objet de désir à la sensualité marmoréenne et insidieuse soumis au regard de tous et qui porte ses yeux sur un ailleurs impalpable. La voici dominant un spectacle maussade, sarclant l'intimité larvée comme la gardienne d'un âtre des vanités prompt à s'étendre pour embraser la catharsis.


  Frédéric Flament


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