Le Château dans le ciel
Réalisé par Hayao Miyazaki
Avec : Mayumi Tanaka, Keiko Yokosawa, Kotoe Hatsui, Minori Terada
Durée : 2:04
Pays : Japon
Année : 1986
Web : Site Officiel
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Profitant de la notoriété acquise grâce à Princesse Mononoke et Le voyage de Chihiro, arrive sur nos écrans ce 2ème long-métrage de Hayao Miyazaki, réalisé en 1986. Le Château dans le ciel, c'est avant tout ces lieux mythiques qui font rêver les enfants, les romantiques et les conquistadors.
Des villes ou civilisations légendaires, vestiges et dépositaires de tout ce que l'on aurait perdu, et en premier lieu la magie de l'ancien monde. Alors pourquoi pas une cité-état, Laputa (titre original), qui flotterait au-dessus des nuages (soit au-dessus de la réalité), reprise du chapitre Voyage à Laputa des Voyages de Gulliver de Swift ; ici objet des convoitises d'un gouvernement militaire et de pirates de l'air alléchés par ses richesses légendaires. Pour l'atteindre ils se disputent une jeune fille, descendante de ce royaume, et possesseur d'une pierre magique, clé d'accès de ce royaume. Celle-ci trouvera refuge et aide chez un jeune garçon mineur de fond et rêveur, qui veut également prouver l'existence de ce monde, afin de respecter la mémoire de son père qui y a consacré sa vie.
Voilà un manuel de légendes où on peut y lire aussi bien l'Atlantide, Mû, Ys, Corto Maltese en Sibérie, Le Maître du monde de Verne, Swift donc, ou enfin ce même Miyazaki et son premier film Nausicaa (le monde vit sur les cendres d'une puissante civilisation détruite et va en réveiller les secrets enfouis). Des légendes mêlées, confondues, brassées, qui évoquent la dualité entre le profane et le sacré, l'âge d'or et l'âge de fer grecs. Nostalgie de la perfection technologique et de la plénitude culturelle mises en opposition ici à un monde rude et vulgaire, violent, sale, chtonien, à l'esthétique de révolution industrielle, toute en bielles, rouages, fumées, vapeurs, cheminées et mines. Une opposition simpliste qui fonctionne crescendo, et qui repousse délicatement de la main cette naïveté sous-jacente par une élégance de la narration et de la réalisation ; ce n'est pas une simple aventure, mais une fable.
Car le voyage de ces deux enfants ne s'arrête pas à la découverte de Laputa : Miyazaki questionne la validité et la légitimité de ces fantasmes d'un ailleurs improbable, pour privilégier l'acceptation du réel ; il faut en tirer la substantifique beauté, noyée dans la vulgarité environnante.
Une morale peu enfantine pour une fable moderne, emprunte d'une poésie de la violence, où la beauté côtoie la Mort, où l'Enfer et le chaos sont à portée d'une simple parole imprudemment prononcée dans des élans d'avidité. La touche japonaise aux dimensions bibliques où le syndrome des bombes de 1945 continuent à la date du film (contemporain de Akira) à hanter les esprits. Allons, trêve de noirceur, il s'agit d'un film d'animation ; et malgré un aboutissement vite expédié, il annonce la maturité du merveilleux Voyage de Chihiro. Mais racontez-moi quand même cette histoire, quand bien même elle ne serait qu'une coquille, une structure fondamentale propre à toutes ces histoires qu'on a pris plaisir à écouter mille fois, traversant les âges et égrenant les conteurs.
Raki Gnaba
Le Château ambulant
Kiki la petite sorcière
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