Avec : Leonor Baldaque, Leonor Silveira, Ricardo Trepa, Ivo Canelas
Durée : 2:13
Pays : Portugal
Année : 2002
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Le prolifique Manoel de Oliveira revient avec une très belle adaptation d'un livre de sa romancière fétiche, Augustina Bessa-Luis.
Le Principe de l'Incertitude met en scène un quatuor tragique dans un Portugal contemporain. Le riche Antonio épouse la désargentée Camila. José, le frère de lait d'Antonio et fils de la servante, est épris de Camila. Cette dernière accepte néanmoins de s'unir à Antonio. Elle endure alors les douleurs de ce mariage. Son conjoint, violent, continue à entretenir une liaison avec la dangereuse et trouble Vanessa, tenancière d'un tripot et impliquée dans de sombres affaires. Camila endure avec un stoïcisme, qui confine à la sainteté, l'humiliante situation, dont elle sort, victorieuse et grandie. En effet, le diable finit par s'en mêler et il punit les ignobles et mesquins Antonio et Vanessa, ainsi que la servante qui a entretenu depuis toujours le mensonge…
Un film austère, qui brille par la composition de ses cadres et la picturalité de ses plans. Il y a de la noblesse et de la sainteté, ainsi que du mysticisme chez les personnages de Manoel de Oliveira. Il y aussi beaucoup d'humour. En effet, Oliveira observe avec ironie ces personnages, partagés entre de nobles aspirations et la bassesse de leur nature. Il en profite aussi pour composer un magnifique personnage de femme, celui de Camila, sorte d'icône religieuse, acceptant son martyre…….du moins, en apparence. Car Camila va révéler une nature complexe et moins noble qu'il n'en paraît.
C'est sur son sourire que se clôt le film, un rien pervers, du plus grand réalisateur européen. Cependant, l'accueil du public a été mitigé, tant le film exige, de la part du spectateur, une qualité de regard et une attention soutenues, ne serait-ce que pour démêler les intrigues qui se nouent entre les différents protagonistes.
Comme toujours le maître recourt aux plans séquences, ce qui donne au film un rythme intérieur particulier, son souffle et son mystère. Mais il semblerait que l'ennui est prévalu sur la Croisette, ce qui n'est guère étonnant car les sentiments que choisit de mettre en scène Oliveira appartiennent à une autre époque : la vertu, le courage, la noblesse d'âme, la grandeur…. Oliveira n'est pas insensible à la perte de ces valeurs, bien au contraire. Son héroïne dit même que « le Portugal est devenu une loterie. Tout le monde veut gagner, tout le monde veut quelque chose qui console d'être pauvre ». Oliveira sait donc que le Portugal a changé de visage et ses films prennent en compte cette profonde mutation. En attestent la modernité jamais démentie de tous ses films.