critique de Quatre Etoiles
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Plaisir euphorique et limpide que celui dans lequel nous plonge Christian Vincent (La Discrète, La Séparation…) avec son Quatre Etoiles. En une poignée de plans orfévrés ou quelques variations alertes de tempo, il impose de manière désinvolte un canevas épuré mais d'une classe folle. Immédiatement le public tombe en pâmoison, non seulement devant une Isabelle Carré flamboyante et langoureuse ou un José Garcia à la stature désormais magistralement assise, mais surtout devant le ton résolument imprévisible et fluide de l'ensemble. En privilégiant les plans-séquences échevelés, les couleurs diaprées, les costumes atemporels ou les rebondissements rocambolesques, cette comédie ludique et habilement troussée devient totalement perméable à toute sorte de genres, d'idées ou d'influences évitant ainsi de s'embourber dans des clichés castrateurs. Un instant s'évapore, fredonné allegro, pour être suivi aussitôt par un autre subtilement différent mais tout aussi festif pour un auditoire brillamment ballotté entre tendresse et hilarité. La maîtrise dont fait preuve le cinéaste est saisissante de par sa culture et son humilité. Jamais il ne prend le parti de l'épate futile du glamour ou du swing - symptomatique de certaines productions de Steven Soderbergh à l'instar d'>Ocean's Eleven - pour s'en remettre entièrement à ses acteurs, tous impeccables. Le risque étant bien évidemment de se faire submerger par des personnalités puissantes et iconoclastes. Aussi la mise en scène - un brin métronomique - est-elle élaborée pour faire sans cesse converger les énergies à l'image - les personnages se heurtant aux teintes de vert, aux couloirs feutrés de l'hôtel ou aux voies diligentées sont forcés de réinventer constamment, de proposer de nouvelles attitudes pour éconduire la sclérose -, agréger fraîcheur, sexualité ou gravité en un espace clos qui finit bien évidement par exploser en spirales pyrotechniques avec le plaisir charnel de Franssou (argent embarrassant et robe d'apparat sont éjectés du véhicule). Les dernières images et le turbulent générique de fin incitent à reconsidérer le long métrage canaille à l'aune de la précédente collaboration entre Christian Vincent et Isabelle Carré, Beau Fixe. Dans cette œuvre de jeunesse, il était question de chrysalide adolescente, des différents pans d'une même personnalité attendant de s'affiner et de fusionner dans une station balnéaire, antichambre de l'âge adulte. Quatorze années plus tard le cheminement des deux artistes coïncident encore avec un personnage précoce et boulimique assimilant à une allure vertigineuse tous les registres et les codes de l'univers dans lequel il évolue. Les ayant domptés, elle peut maintenant s'y abandonner avec gourmandise, en jouir, spontanée et pétillante. Et le spectateur de se lécher les babines avec elle.
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