Subtil et dépouillé, Exciter explore de nouveaux horizons tout en restant fidèle à la formule à succès du groupe. Pour la première fois, Depeche Mode s'inspire directement d'autres courants musicaux, proposant un album musicalement varié, mais aussi moins personnel.
Au premier abord, le disque marque par ses arrangements succints loin du son pompeux de Songs Of Faith And Devotion. A l'image du single "Dream On", les rythmes sont en général discrets et les guitares acoustiques tandis que la voix de Dave Gahan est avec surprise plus douce et empreinte de fragilité. L'électronique est utilisée avec parcimonie, mettant en avant la pureté des morceaux plutôt que de les noyer dans leurs arrangements. Si le style de Martin Gore est toujours présent, il ose cette fois-ci s'aventurer dans d'autres univers musicaux, avec ironie toutefois puisque ses emprunts proviennent souvent de groupes qu'il a inspirés soit de collègues de promotion, si l'on peut dire. Mais la grande surprise est la présence de certaines mélodies légères aux antipodes de leurs habituelles sombres harmonies.
"Dream On" témoigne donc du contraste de cet album, arborant une certaine légèreté tout en restant fidèle aux riffs accrocheurs du groupe dans la lignée de "Personal Jesus" et "I Feel You". "Shine" injecte des sons techno dans un morceau classique tandis que "Sweetest Condition" se fait l'écho sans intérêt d'un ancien morceau déjâ peu palpitant. "When The Body Speaks" est sans aucun doute la perle de cet album, offrant une superbe ballade atmosphérique qui rappellera "With Or Without You" de U2. "The Dead Of The Night" est une autre référence évidente, puisqu'on pourrait l'assimiler à du Nine Inch Nails, bien que les paroles se moquent gentiment du mouvement industriel: "We are the dead of night, we're in the zombie room, we're twilight's parasites with self-inflicted wounds". "Love Theme" et "Easy Tiger" sont deux sympathiques mais bénins interludes. Tout comme "Dream On" avec sa voix douce, ses guitares acoustiques, ses rythmes et ses sons électroniques légers, "Free Love" est un single en puissance avec un refrain imparable. "Comatose" est la typique ritournelle torturée et pénible que Gore inclus sur chaque disque du groupe. Avec son refrain accrocheur et son beat dance, "I Feel Loved" devraient conduire sur les pistes de danse tous les amateurs de "Behind The Wheel". Vous pourrez demander à qui vous voulez, mais "Breathe" qui lorgne vers Angelo Badalamenti et Twin Peaks, est sans aucun doute la chanson la plus insupportable d'Exciter à cause du chant monotone et des paroles stupides de Gore. Le lancinant "I Am You" vous hypnotisera lentement pour mieux vous séduire. Enfin "Goodnight Lovers", charmante berceuse aux choeurs gospels, conclut parfaitement et en toute tranquilité le LP.
Si Exciter est inégal et volontairement minimaliste, c'est qu'il est avant tout une album transitoire. Tout comme le calme vient après la tempête, ce disque est un moyen pour le groupe de refermer ses blessures et d'exorciser les démons de ses dernières années chaotiques. Au final, un moment de lucidité et un disque agréable et léger laissent présager du meilleur.