Hulk
Réalisé par Ang Lee
Avec : Eric Bana, Jennifer Connelly, Sam Elliott, Nick Nolte
Scénario : James Schamus, John Turman, Michael France
Titre Original : Hulk
Durée : 2:20
Pays : USA
Année : 2003
Site Officiel : Hulk
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Exploitant la manne des adaptations de Comics, Ang Lee porte à l'écran Hulk, bande dessinée culte de chez Marvel, apparue dans les années soixante, dont le super héros est un monstre. Imaginées par Stan Lee (à qui l'on doit également les Fantastic Four) et Jack Kirby pour les dessins, les aventures du géant suscitèrent un véritable engouement.
Traduite dans plus de 75 pays, la bande dessinée avait déjà donné lieu à une série télévisée et quelques téléfilms, proprement irregardables aujourd'hui. Le temps fait des ravages ! Cependant, en lieu et place du chewing gum numérique, dont l'animation laisse pour le moins à désirer (ses mouvements restent très saccadés, en dépit du travail titanesque accompli par l'équipe technique), on lui préfère toujours la présence musclée du culturiste Lou Ferrigno. Rendant hommage à la grande époque, Ang Lee multiplie les clins d'œil et invite l'acteur à faire une apparition dans son long métrage. Ferrigno incarne un vigile, flanqué d'un autre comparse tout aussi prestigieux : Stan Lee, lui-même !
La nostalgie s'arrête là. En effet, l'adaptation proposée par Ang Lee surclasse de loin tout ce qui avait été mis en images jusqu'alors autour du super héros, aux colères homériques. Cette réussite tient dans l'extrême fidélité du réalisateur à la bande dessinée originelle. Hulk, dans la lignée de son personnage initial, est un géant, pouvant se déplacer à vive allure et accomplir des sauts de plusieurs kilomètres. En dehors de ces prouesses physiques, Ang Lee exploite assez bien le traumatisme qui préside à la destinée du héros névrosé. La scène primitive, portant le halo funeste du père, est déclinée tout au long du film, pour trouver son acmé dans le dernier tiers du métrage. Le fonds psychanalytique, des plus riches, participe de la complexité du héros. Le rapport conflictuel au père est fondateur, tout à la fois empreint d'émulation, de dégoût et de fascination pour cette part monstrueuse que le jeune Banner, par atavisme, porte en lui. Cette dégénérescence lie les deux hommes, autant qu'elle les sépare. Dès lors, la survie de l'un passe par l'anéantissement de l'autre. Cependant, l'affrontement final déçoit : à la limite du visible, confus au lieu d'être spectaculaire, il tire le film vers le bas.
Une réflexion humaniste émaille le film de bout en bout, à l'instar de la bande dessinée. Ang Lee figure l'ivresse de la monstruosité et des possibilités de transgression qu'elle apporte. Ainsi, après sa première transformation, Banner Junior évoque son euphorie, mêlée d'un sentiment de liberté incommensurable ; en somme, le vertige d'un être aux confins de l'inhumanité, aspect qui aurait mérité d'être développé davantage encore dans le film.
Autre point fort du long métrage, son traitement. Ang Lee reprend le découpage de la bande dessinée, en usant du split screen avec bonheur. L'écran est divisé en vignettes, clin d'œil au « comic » de base. Cette mise en scène excède le simple exercice formel, pour imposer son originalité. Ang Lee n'y recourt pas systématiquement. Cet usage parcimonieux est réservé aux scènes les plus chargées dramatiquement. Ajoutons à cela que le film s'ouvre comme une bande dessinée. Le très beau générique du début (qui se déploie sur une musique virevoltante de Danny Elfman) s'achève sur le nom « Marvel » barrant tout l'écran. Un livre/film, inaugurant les aventures d'un super héros, objet stylisé qui n'aurait pas survécu à ses faiblesses, s'il n'avait été réalisé par un cinéaste féru de culture « Marvel ». Pour preuve, Ice Storm, l'un de ses films précédents, dans lequel le jeune héros (Tobey Maguire, appelé à incarner Spider-Man peu après !!) s'adonne à la lecture des Fantastic Four.
Ce regard passionné évite au film un naufrage annoncé, en dépit d'une fin désinvolte, brouillonne et pour le moins caricaturale (notons au passage que l'acteur Eric Banna, pourtant convaincant dans Chopper, est aussi expressif qu'une courgette !). Hulk reste, en somme, une réalisation honnête pour un blockbuster estival.
Sandrine Marques
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