Space Cowboys, de et avec Clint Eastwood est un spectacle décontracté et amusant qui ne se prend pas au sérieux. Le film suit l'entraînement d'une bande de cosmonautes à la retraite, seuls capables de pouvoir réparer un satellite qui menace de tomber sur terre. Le scénario a l'air familier? C'est normal puisque Space Cowboys est avant-tout une satire d'Armageddon.
Le film est la meilleure réalisation d'Eastwood depuis son oeuvre majeure Unforgiven. Si ses deux films précédents manquaient de mordant et étaient un peu trop conventionnels, Eastwood retourne ici à ses thèmes favoris, en particulier l'auto-dérision qui l'a accompagné tout au long de sa carrière de The Outlaw Josey Wales à évidemment Unforgiven. Et puisque l'on parle de dernier, Space Cowboys est justement la rencontre d'Unforgiven et d'Armageddon (Space + vieux Cowboys!). En effet, Eastwood fait une satire du genre "Film Spacial" tout en en sonnant le glas, comme il l'avait fait avec le western dans Unforgiven. Et le constat est clair: tout a été dit et rabâché jusqu'à la corde; avis aux Right Stuff, Appollo 13 et autres Armageddon.
Le film part à la base d'un fait réel et développe une histoire rendue d'autant plus plausible depuis le récent séjour dans l'espace de l'américain John Glen.
Eastwood incarne un ancien pilote qui avait été écarté du premier voyage de l'Histoire dans l'espace au profit d'un chimpanzé (!). Il vivait depuis rongé par cette opportunité manquée, tout comme son ancien équipage, et quand la chance se présente quelques dizaines d'années plus tard, il saute sur l'occasion, ayant même recours au chantage afin qu'ils puissent enfin concrétiser leur rêve. L'équipage se compose d'un pilote casse-cou (Tommy Lee Jones), d'un navigateur coureur de jupon (Donald Sutherland) et d'un spécialiste reconverti prêcheur (James Garner). Le film sert donc de prétexte à suivre leur entraînement, se moquant avec beaucoup d'ironie de ces quatre retraités de choc, mais aussi de la bureaucratie de la NASA. Les quatre forment une sacrée brochette: leur intéraction monopolise l'écran et porte tout l'humour du film. On s'amuse ainsi beaucoup de leurs difficultés à l'entraînement ainsi que de leur comportement frondeur face à cette grosse machine qu'est la NASA. La deuxième partie se veut plus sérieuse et suit les péripéties de leur mission dans l'espace. L'ironie est pourtant présente, au second degré, puisque la mission, son retournement de situation et ses conséquences se rapprochent étrangement d'Armageddon. A une différence prés: le film évite de s'y attarder trop longtemps et de surenchérir en explosions et effets spéciaux. Et le sacrifice final renvoie directement à Willis dans Armageddon, en prenant le contre-pied. Ce sacrifice y apparaît ainsi comme un non-évènement et ignore les usuelles effusions lacrymales. La dernière scène, volontairement irréelle et poétique ne fait que confirmer l'ironie du projet d'Eastwood vis-à-vis des clichés du genre.
Eastwood effleure aussi le thème de la guerre froide et de ses conséquences contemporaines. Il tire aussi sur la "Corporate America" (culture des entreprises américaines) à travers sa devise "being a team player" (avoir l'esprit d'équipe). A maintes reprises, il est reproché ainsi au personnage d'Eastwood de ne pas avoir l'esprit d'équipe. Une remarque sans aucun doute à double-trachant quand on sait que l'acteur a tout au long de sa carrière interprété des héros solitaires, que ses choix d'anti-héros allaient toujours à l'encontre des stéréotypes hollywoodiens, et donc qu'il s'est toujours démarqué du reste de l'industrie (jusqu'à tourner des westerns chez les italiens!).
Les acteurs quant à eux s'en donnent à coeur joie. Eastwood mène la danse et réendosse son air renfrogné et grognon d'Unforgiven. Il se moque de sa propre vieillesse, et ébrèche son image glamoureuse et virile. Tommy Lee Jones pour une fois ne joue pas le rôle d'un flic entêté à la poursuite d'un innocent, et arrive par moment à nous amuser avec son accent, une gageure pour cet acteur si peu charismatique. Mais c'est sûrement Donald Sutherland qui a le meilleur numéro (déjà aux côté d'Eastwood dans Kelly's Heroes). Son rôle de vieux coureur de jupons excentrique qui ne veut pas vieillir est jouissif et apporte les meilleures bouffées de rire du film. Enfin, James Garner un peu en retrait vient compléter cette bande de vieux de la vieille. Un seul mot est de rigueur: auto-dérision. Et le film ne pourrait marcher sans la bonne humeur qu'apportent ses quatre acteurs qui s'amusent vraiment; et ça se voit.
Space Cowboys est un film simple mais efficace qui assure pleinement sa réelle mission: nous divertir avec une pointe de sarcasme. Espérons qu'après ça Hanks raccrochera son panoplie d'astronaute et qu'Hollywood arrêtera de nous refourguer toute la conquête de l'espace depuis. . . ce célèbre chimpanzé.