Tales from the Gimli Hospital
Réalisé par Guy Maddin
Avec : Kyle McCulloch, Michael Gottli, Angela Heck, Margaret Anne MacLeod
Durée : 1:12
Pays : Canada
Année : 1988
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Réalisé par le cinéaste canadien culte Guy Maddin, Tales from the Gimli Hospital est un film surréaliste et iconoclaste où le cinéma des années 20 rencontre un univers insolite qui n'est pas sans rappeler d'autres ovnis cinématographiques comme Eraserhead.
Tales from the Gimli Hospital démarre avec ironie, nous étant présenté comme une histoire racontée à des enfants, alors que le récit qui va suivre ressemble plus à un cauchemar qu'à un conte de fées. Kyle McCulloch incarne Einar, un jeune pêcheur qui vit dans un village côtier où les poissons, au-delà de leur rôle nutritif, sont utilisés sous de multiples formes ; exemple le plus amusant, leur jus est utilisé comme shampooing. Tombant malade, Einar se retrouve à l'hopital Gimli, une grange aménagée que les patients - en quarantaine - partagent avec des animaux. Einar se lie d'amitié avec son voisin de chambre Gunnar (Michael Gottli) qui bénéficie des faveurs des infirmières. Après avoir tenté vainement de susciter l'intérêt de ces dernières, Einar tombe dans la disgrâce lorsqu'un des secrets choquants qu'il révéle affecte Gunnar personnellement.
Tales from the Gimli Hospital est tourné en noir et blanc, la pellicule étant volontairement abîmée afin de donner au film l'aspect vieillot des productions du début du XXème siècle. Le film est certes sonorisé mais l'approche très visuelle de Maddin et la musique lorgnent ouvertement vers le cinéma muet. La narrative est entrecoupée de récits et séquences oniriques qui viennent renforcer l'étrangeté de l'ensemble.
Tales from the Gimli Hospital est construit sur une base constituée de symboles fragmentés qu'il est difficile de déchiffrer. La dimension religieuse du film est cependant évidente. Le film mélange rites chrétiens, païens et indiens au centre desquels on trouve la notion de péché. Les poissons qui sont assimilés à une nourriture de base quasi-spirituelle dans la bible sont ici déifiés. Leur omniprésence dans cette société comme les découpages de Gunnar en témoignent. Ils semblent aussi véhiculer le châtiment des pécheurs. L'ensemble du village est atteint d'une épidémie de variole, sorte de punition divine et Einar qui a commis un acte sacrilège n'est pas épargné. C'est seulement après qu'il ait enduré la souffrance de la maladie - sorte de pénitence - et les pulsions justicières de Gunnar, que tout semble revenir à la normale.
Tales from the Gimli Hospital est un parfait exemple du cinéma de Guy Maddin, une œuvre trempée d'humour noir mais difficile à aborder, tant au niveau du fond que de la forme. On pense inévitablement à Buñuel et Lynch pour son côté surréaliste et aux pionniers du septième art pour son approche esthétisante qui bannit l'aspect superficiel de l'avancée technologique et pousse le spectateur dans ses retranchements. En retournant à une cinématographie basique et sans fard, Maddin recentre le cinéma sur l'idée plutôt que sa représentation et offre une approche sans concession bien plus radicale que le Dogme.
Le DVD contient aussi The Dead Father, le premier court-métrage de Guy Maddin, où un père de famille décédé vient hanter la vie quotidienne de son fils comme si rien n'était. Enfin, on peut voir Hospital Fragment, quelques minutes fantasmatiques inédites de Tales from the Gimli Hospital.
Fred Thom
The Saddest Music in the World
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