Mémoires D'une Geisha movie review DVD critique de Mémoires D'une Geisha



 

 



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Mémoires D'une Geisha

:. Réalisateur : Rob Marshall
:. Acteurs : Zhang Ziyi, Gong Li
:. Scénario : Robin Swicord
:. Titre Original : Memoirs of a geisha
:. Durée : 2:20
:. Année : 2006
:. Pays : USA
:. Site Officiel : Mémoires D'une Geisha


1929, Chiyo la fille d'un couple miséreux de pêcheurs est bradée à une trafiquant de chérubins qui l'expédie immédiatement dans l'hanamachi, quartier des plaisirs de la capitale japonaise. Là, elle est asservie au sein d'une okiya comme bonne à tout faire et devient la victime des brimades et mesquineries de la splendide, impitoyable et vénéneuse geisha Hatsumomo. La jeune fille ne devra son salut qu'à une rencontre fortuite d'avec un magnat de l'électricité qui la bouleversera jusqu'aux tréfonds de l'âme et à la protection de Mameha, rivale solaire de sa persécutrice. Sous ce parrainage complice inattendu, elle s'ouvrira aux arts et entamera une initiation échevelée vers les sommets. Elle devient alors Sayuri la geisha la plus vénérée de son temps évinçant son ancienne geôlière et rayonnant majestueusement sur ses contemporains. La guerre éclate alors faisant exploser ce monde de rites séculaires en bribes éparses désemparées.

L'adaptation hollywoodienne du best-seller d'Arthur Golden se révèle une expérience des plus plaisantes. Romanesque et aérien le script est ainsi magnifié par la réalisation fluide et chorégraphiée de Rob Marshall (Chicago) pour incarner, littéralement et intelligemment (image chatoyante et imbibée des kimonos rouges dilués dans une rivière), une héroïne semblable aux filets d'eau qui s'écoulent entre les écueils hérissant son lit. Certes l'expérience de cette chaste fresque n'est pas exempte de reproches, loin s'en faut. Le féru de culture nippone arguera un exotisme factice ingéré par une mécanique implacable le noyant sous des symboles soyeux et satinés. Il y a cette béance, sépulcrale et putassière, que le cinéaste s'ingénie à ériger pour dissocier la gourgandine vulgaire de la geisha racée et hiératique. Pudibonderie qui s'incruste durablement dans les rets de la pellicule pour culminer lors de la mise aux enchères du mizuage. La perte de la virginité de Sayuri sera honteusement expédiée en une très courte scène où le sexe de l'héroïne s'ouvrira sur l'arrière-plan - reconnaissons tout de même la hardiesse du film qui appose immédiatement une scène paroxystique entre Zhang Ziyi et Gong Li, dont l'ire embrase la demeure. Enfin, comment ne pas souligner l'absence regrettable des soubassements historiques qui devraient baliser l'intrigue : un filet de voix radiophonique et trois soldats en pagaille sont de piètres incursions de la terrifiante réalité dans un univers amidonné tombant en désuétude.

Si le cinéaste abhorre la dimension charnelle de son œuvre il ne saurait se départir de la généalogie artistique de son projet. De fait, il semble puiser une partie de son inspiration dans la cinématographie asiatique moderne, comme s'il flânait en coulisses. Bien entendu la structure en diptyque entre enfance et âge adulte rappelle L'Odeur De La Papaye Verte mais davantage dans les images de l'océan ouvrant le propos, façon Hideo Nakata ou dans la propension de cloisonner une venelle pour circonscrire le microcosme qu'elle abrite à l'instar de Blood And Bones que les accointances s'affirment. L'esthétique léchée participant à " l'expérience du vide " explicitée en introït par une voix-off chevrotante. La perversion du récit se voit esquivée au profit de frasques lyriques et de leurs lots de pétales évanescents, mais elle les crucifie graphiquement par des résurgences aiguisées. L'œil accablé de Gong Li s'effaçant dans des volutes de fumée, comment espérer peinture plus sublime et désenchantée de " l'ombre et du secret " ?

La légèreté accorte du long-métrage constitue son attrait le plus somptueux avec la présence mémorable d'une Gong Li transfigurée depuis son expérience pratiquement tantrique avec Wong Kar-Wai sur 2046 et Eros. Elle impose en quelques secondes une sophistication dans le dénuement et l'abandon, de celle d'une beauté souffrant de se savoir condamnée par sa condition. La puissance imprégnatrice de ses traits est telle qu'elle inonde l'écran pour se substituer à une fade Zhang Ziyi - excepté lors d'une séquence de danse d'anthologie - dont le personnage glisse avec le temps vers l'abîme côtoyé depuis des lustres par son aînée. Le choix de la gracile Michelle Yeoh est autrement plus discutable puisque jamais elle ne parvient à approcher la flamboyance intérieure que le rôle de Mameha requérait. La gent masculine bénéficie d'un traitement plus conforme aux attentes nippones avec la performance de l'immense Koji Yakusho qui prouve une fois de plus (Eureka, L'Anguille, Cure, Séance…) sa phénoménale capacité à habiter la distance ardente entre réalité et fiction. Il stigmatise avec Gong Li l'idée même de cette laxité ancrée, de cet interstice séparant de la passion si symptomatique du raffinement japonais : entre l'être et le paraître, le visage et la poudre qui l'estompe, l'élégance inaltérable d'une geisha.


  Frédéric Flament


     Chicago


    


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