Avec : Jason Statham, Qi Shu, Matt Schulze, François Berléand
Durée : 1:32
Pays : France
Année : 2002
Web : Site Officiel
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C'est dans une impasse bien trop familière que nous amène Le Transporteur, dans ce véhicule d'occasion refourgué par quelque concessionnaire sans scrupules. Ni la réalisation efficace de Corey Yuen, ni le cynisme de Jason Statham ne peuvent ainsi sauver ce film qui s'embourbe dans un pot pourri scénaristique honteux où Luc Besson pratique sans vergogne l'art du recyclage.
Jason Statham incarne Frank Martin un ancien Special Force ( ! ) reconverti chauffeur qui transporte des colis suspects pour des clients douteux. L'homme qui base sa réussite professionnelle sur l'application de trois règles bien strictes les enfreint évidemment dès le début du film, ouvrant le colis qu'il transporte pour y découvrir une jeune et belle chinoise ( ! ! ). Il déclenche alors un mécanisme inéluctable et devra mettre à profit ses talents de combattant pour mettre en déroute une organisation criminelle.
Jadis ringard, le cinéma d'action s'est vu régénéré par l'arrivée inopinée de cinéastes comme John Woo, Tsui Hark et les frères Wachowski qui ont su y insuffler du style, de l'émotion et parfois même un soupçon d'activité cérébrale. Besson qui a d'ailleurs contribué à sa façon au renouvellement du genre avec Nikita et Léon, est donc tout aussi peu excusable pour ses dernières productions médiocres (Taxi, Wasabi, Le Baiser Mortel du Dragon) que pour ce scénario qui tire toutes les ficelles du cinéma d'action de série B.
Plus choquant, la prémisse même du Transporteur est une copie pure et simple de celle des fameux BMW Films. Cette série de court-métrages produite par la célèbre marque de voitures met en scène un élégant anglais (Clive Owen) qui transporte dans sa BMW noire des passagers qui sont le plus souvent en danger. La réalisation de chacun des segments a été confiée à des cinéastes de renom, de Wong Kar-Wai à Ang Lee en passant par Alejandro Gonzalez Inarritu, Guy Ritchie et John Frankenheimer (John Woo va d'ailleurs les rejoindre cette année). Besson, apparemment très inspiré, s'approprie le concept du transporteur dans sa BMW noire, troquant seulement un dandy britannique pour un autre puisque c'est Statham qui reprend le rôle d'Owen. L'idée du transporteur est ensuite vide abandonnée, le film laissant place aux habituelles poursuites, explosions et prouesses physiques qui abondent généralement dans le cinéma d'action « straight-to-video » dans lequel Van Damme, Seagal et ses confrères excellent. L'utilisation de la Côte d'Azur comme décor, en particulier Marseille et Nice, rappelle d'ailleurs le plus nerveux Double Team de Tsui Hark. Le final, sorti tout droit de Mad Max 2, rend d'autant plus flagrant l'absence d'inspiration de l'ensemble.
La réalisation de Corey Yuen, plus connu pour ses nombreuses collaborations avec l'ennuyeux Jet Li, est ici inégale, souvent mollassonne, parfois inventive (en particulier l'affrontement dans un dépôt de bus marseillais). Sa dextérité est de plus souvent neutralisée par une bande son qui détruit le rythme, à trop vouloir sonner comme Eric Serra. Seul Jason Statham tire son épingle du jeu, prouvant qu'il a la stature d'une star du cinéma d'action, sans toutefois se séparer d'un cynisme et d'une autodérision qui font toute la différence avec les autres lourdauds du genre (Vin Diesel en particulier). Qi Shu (Millenium Mambo) réussit à faire percer son charme pétillant malgré le peu d'opportunités qui lui sont offertes.
Le Transporteur échoue d'autant plus qu'il se voulait justement parodique. Si le personnage de Statham amuse par moments, le film conçu comme une bande dessinée aseptisée embrasse trop excessivement ce dont il est sensé se moquer. Au contraire de Double Team où l'utilisation de deux personnalités grotesques (Van Damme et Rodman) reflétait le second degré du spectacle offert, Le Transporteur se prend au sérieux derrière son masque « comique » et ne sert que de prétextes à une enfilade de scènes d'action réchauffées.