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A.I. Artificial Intelligence













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A.I. Artificial Intelligence
Réalisé par Steven Spielberg

En dĂ©pit de son titre à la froideur scientifique, A.I. est loin d'être une roborative dĂ©monstration technologique, mais plutôt un conte de fĂ©es pour adultes ayant pour centre un enfant.

Dans un futur plus ou moins proche, Haley Joel Osment est David, un robot unique en son genre puisqu'il a Ă©tĂ© programmĂ© a aimer. PlacĂ© au sein d'une famille pour remplacer un fils malade, David tente de gagner l'amour de sa mère adoptive. Mais lorsque le garçon rentre guĂ©ri à la maison, la cohabitation devient difficile et la mère se voit obliger à contrecoeur d'abandonner David en pleine nature. Celui-ci n'aura alors qu'un seul but, celui de trouver la fĂ©e bleue qui, à l'instar de Pinocchio, le transformera en vĂ©ritable enfant afin de pouvoir gagner l'amour maternel rĂ©ciproque qui lui fait dĂ©faut.

Le film est construit en trois parties bien distinctes. Dans la première partie, David tente d'être assimilĂ© dans une famille humaine, tandis que la deuxième suit ses pĂ©rĂ©grinations dans sa quête et qu'enfin la troisième le confronte à son rêve.

Le premier segment est sans aucun doute le plus psychologique puiqu'il montre un jeu du chat et de la souris entre David et sa mère Monica (Frances O'Connor) dont l'enjeu est l'amour maternel. David dĂ©veloppe alors un comportement obsessionnel et envahissant aux limites d'un harcèlement sordide. Pourtant l'enfant rĂ©ussit petit à petit à gagner une affection plus forte que celle qu'on pourrait porter à un animal de compagnie ou un jouet. Si ce n'Ă©tait pour le retour du "fils prodigue", le robot parviendrait presque à devenir un membre de la famille à part entière. Dans ces moments-là la rĂ©alitĂ© flirte dangereusement avec le virtuel, et Spielberg montre clairement la menace que l'intelligence artificielle reprĂ©sente pour la race humaine.

David est alors abandonnĂ©, permettant ainsi au film d'entamer une seconde partie suivant les pĂ©ripĂ©ties du jeune robot à la dĂ©couverte du monde ("David Au Pays Des Merveilles') et au rĂ©alisateur de dresser une satire lĂ©gère de la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine. En commençant par l'abandon des animaux de compagnie si en vogue à en croire le nombre de crocodiles et serpents en tout genre qui pullulent dans les eaux vaseuses des cours d'eau ici à L.A. L'abandon de David dĂ©montre la saturation de la sociĂ©tĂ© de consommation amĂ©ricaine oú tout devient jetable et interchangeable, une fois la mode passĂ©e. On dĂ©couvre aussi un cirque oú les robots sont sacrifiĂ©s au spectacle, à mi-chemin entre le thème de l'holocauste (La Liste de Schlinder) et celui des gladiateurs (Gladiator produit par Dreamworks, la sociĂ©tĂ© de production du rĂ©alisateur). Si les rĂ©fĂ©rences sont bien ouvertement Ă©videntes, ce cirque renvoie aux spectacles dĂ©jà courants au fin fond de l'AmĂ©rique profonde oú des foules en extase contemplent de gigantesques camions robots s'affronter et se dĂ©truire. Et si vous regardez avec attention ces spectateurs, vous comprendrez que ce sont bien les mêmes.

David rencontre ensuite le robot Gigolo Joe (l'excellent Jude Law), un surhomme, qui comme on l'aura compris, n'a pour but que de combler les femmes, et semble renvoyer au phĂ©nomène de plus en plus important des femmes cĂ©libataires et indĂ©pendantes qui n'ont pas besoin des hommes pour subsister (voir le succès de Sex In The City). Gigolo Joe amène alors l'enfant à la ville rouge, une ville de mille lumières oú règne le vice, transposition Ă©vidente de Las Vegas. Les deux se rendent alors à Docteur Know, une sorte de fast-food du savoir oú vous pouvez poser n'importe quelle question à un ordinateur se trouvant dans une sorte de peep-show. Spielberg dĂ©nonce un certain nivèlement du niveau culturel amĂ©ricaine oú des chaînes comme Barnes & Nobles et Blockbuster ont le monopole d'une culture prĂ©mâchĂ©e des masses. Le problème c'est qu'avec des films comme Jurassic Parc, le cinĂ©aste a les pieds en plein dedans. Il en profite toutefois pour faire un clin d'oeil au 2001 de Stanley Kubrick avec son ordinateur. Un autre problème de ce second segment est la facilitĂ© avec laquelle nos protagonistes se sortent de chaque situtation pĂ©rilleuse et qui dĂ©montre d'un scĂ©nario parfois fainĂ©ant ou bâclĂ©.

Enfin, David et Gigolo Joe arrivent à destination, là ou se trouverait la fĂ©e bleue. Beaucoup a Ă©tĂ© dit sur le fait que A.I. Ă©tait au dĂ©part un projet de Stanley Kubrick qui l'a confiĂ© par la suite à Spielberg afin de pouvoir travailler sur Eyes Wide Shut. La prĂ©sence de Kubrick ne se fait sentir que durant quelques minutes dans ce dernier acte et principalement dans une effrayante scène de rage. C'est à ce moment que l'on comprend que l'on est bien dans un film de Spielberg et non dans une oeuvre de Kubrick. Là oú ce dernier aurait vraisemblablement optĂ© pour une fin logiquement cruelle et sombre, Spielberg par un coup de baguette magique improbable se tourne vers le conte de fĂ©es afin de sauver la situation. Le rĂ©alisateur nous rappelle qu'il est l'auteur d'ET et de Rencontre du Troisième Type, revenant en territoire connu. La prĂ©sence d'un nounours bien mignon tout au long du film ne fait que confirmer ce sentiment. Si cette conclusion s'avère charmante, le denouement ou morale de l'histoire vient remettre en question le propos d'un tel film. Spielberg proclame que c'est l'amour qui rend humain, ce que l'on savait dès le dĂ©but puisque c'Ă©tait l'objet de la quête de David.

La rĂ©alisation est quant à elle soignĂ©e et vivante sans toutefois nous assommer d'effets spĂ©ciaux inutiles. Mais ce qui marque surtout, c'est le jeu des acteurs. Haley Joel Osment passe en finesse entre une machine trop froide, un enfant en mal d'amour et une crĂ©ature dangereusement obsĂ©dĂ©e tandis que Jude Law brille à l'Ă©cran en gigolo extraverti. Frances O'Connor sait aussi montrer l'ambivalence de ses sentiments.

Avec A.I. Artificial Intelligence, Spielberg signe un film ambitieux et prenant mais paradoxalement au propos quelque peu vain. Un film à voir nĂ©anmoins, bien supĂ©rieur à Saving Private Ryan et autres "dinosaureries".

  Fred Thom

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