Avec : David Duchovny, Catherine Keener, Julia Roberts, David Hyde Pierce
Durée : 1:40
Pays : USA
Année : 2002
Web : Site Officiel
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Gus est un producteur hollywoodien à grand succès. Il organise une fête pour son quarantième anniversaire. Récit de la journée de quelques invites.
Contre-pied
Soderbergh avait étonné l'an dernier. Considéré comme l'un des derniers bastions du cinéma indépendant américain, il avait cédé à la tentation des majors en réalisant Ocean's Eleven, film fort sympathique mais grosse machine hollywoodienne au casting tendance et au succès commercial énorme. Il étonne encore plus ici en effectuant un retournement des plus impressionnants. Le casting reste très people (Julia Roberts tient le haut de l'affiche avec David Duchovny, Brad Pitt et autres) mais le budget minuscule de 2 millions de dollars (soit un dixième du salaire habituel de Roberts) et la forme du long métrage font de Full Frontal un film a part, un film étonnant, une véritable expérience cinématographique. Soderbergh s'essaye en effet ici à un cinéma expérimental influencé par le Dogme danois en dictant en des règles restrictives pour ses acteurs : Se coiffer soi même, se maquiller soi même, choisir ses costumes et improviser le plus possible. Le résultat est étrange au possible. En plus des mouvements de caméra saccadés inhérents a la camera DV, Soderbergh travaille sur les flous, la lumière et les ombres pour traiter son sujet : le cinéma. Il profite de cette mise en abyme (le film raconte l'histoire d'un tournage) pour dresser un tableau, neutre en apparence, d'Hollywood et pour effectuer une introspection, une autocritique de son travail.
L'action se déroule entre les deux villes phares du cinéma américain : New York et Los Angeles. Le New York de Scorcese et Allen, le Los Angeles de Bay et Bruckheimer (pour etre caricatural). Les deux trajets NY-LA effectués par Julia Roberts et l'équipe du film symbolisent bien évidemment le parcours de Steven Soderberg et lui permettent d'introduire au spectateur que nous sommes le thème de son film : une analyse personnelle, intime de son travail. Full Frontal lui permet de répondre au critique, d'exorciser le démon block-buster, de se laver les mains sales d'avoir touche le fruit défendu pour tout cinéaste indépendant. Un film mot d'excuse pour mauvais écolier qui lui permet de se réhabiliter - de façon extrême il faut le préciser, le film étant assez difficilement abordable - auprès de son public de la première heure.
Le spectateur non-avisé, se fiant au casting mais allergique à la technique d'un Von Trier passera son chemin. L'autre sera intrigué par toute cette étude introspective, quasi-cathartique, faite de symboles. Par exemple, deux sœurs (magnifiquement interprétées par Catherine Keener et Mary Mac Cormack) touchent de manière figurée, donc sexuelle, au monde du cinéma (l'une avec un producteur pour de l'argent l'autre avec un acteur) et ne peuvent que regretter leur choix après l'acte.
« Everybody need a relieve » peut on voir sur l'affiche, soit « Tout le monde a besoin de se soulager ». Soderbergh a ainsi tourne la page Ocean's Eleven, peut être pour y revenir, en réalisant un film difficile, peu abordable pour le grand public mais qui malgré cette logique intimiste donne lieu a de jolies scènes, a un très joli numéro d'acteur. Un film sur le film grâce à un film dans le film. Pas forcement bon. Mais une expérience, c'est certain.