Si la figure emblématique associée au passé de la cité reste sans aucun doute Edmond Dantès, héros romancé du Comte de Monte Cristo qui fera l'objet d'une multitude d'adaptations cinématographiques (voir notre dossier), l'héritage historico-culturel de la ville se manifestera dans un grand nombre de productions diverses et variées dont l'une des constantes sera son rôle portuaire.
Basée sur l'oeuvre de Jean Renoir, La Marseillaise (1937), ébauchera le portrait d'un Marseille révolutionnaire, sous la houlette de Jacques Becker, avec dans les rôles principaux Pierre Renoir (frère de Jean), Lise Delamare, Louis Jouvet ainsi que des comédiens du cru, habitués de Pagnol, comme Delmont, Andrex, Paul Dullac (Escartefigue dans Marius) et Blavette. Paradoxalement, le tournage local se limitera à quelques vues panoramiques avec au loin le Garlaban ainsi qu'à une partie de pêche au large des îles, la ville étant reconstituée en studio (en particulier le cours Belsunce et la rue Thubaneau où se trouvait le club des Jacobins ) et le fort d'Antibes incarnant le fort St Nicolas outre l'aspect logistique inhérent à toute production, les présences anachroniques de Notre Dame de la Garde et du pont transbordeur rendaient difficiles l'utilisation de la ville pour la reconstitution du Marseille de 1792.
Ecrit et produit par Sacha Guitry, Le destin fabuleux de Désirée Clary (1941) retracera la vie romancée de la fille du négociant marseillais François Clary, qui après avoir eu une liaison avec Bonaparte deviendra l'épouse du Général de Bernadotte et ainsi la Reine de Suède, son mari ayant pris la tête du pays. Geneviève Guitry et et Gaby Morlay incarneront la jeune Désirée et la future Madame Bernadotte tandis que Jean-Louis Barrault et Sacha Guitry seront Bonaparte et Napoléon.
Si le film en costume, offrant diverses incarnations d'un Marseille pre-révolutionnaire à un Marseille post-napoléonien, sera un acteur majeur de cette reconstitution historique par l'image, les cicatrices émotionnelles, encore vives, de l'occupation constitueront l'autre grand rendez-vous avec l'histoire ; une période d'autant plus marquante que les bombardements, mais surtout la destruction systématique opérée par l'armée allemande, défigureront à tout jamais la ville avec la perte de son emblématique pont transbordeur.
Au côté de L'Armée des Ombres (1969), film incontournable de Jean-Pierre Melville sur la résistance avec Lino Ventura & Simone Signoret, on signalera entre autres, Les 7 tonnerres (1951) film anglais d'Ugo Fregonaise avec Tony Wrigh et Kathleen Harrison qui relate les événements tragiques qui ont frappé la cité durant la seconde guerre mondiale, en particulier la destruction des quartiers du Vieux Port par les troupes allemandes d'occupation en 1943. Réalisé par René Allio (voir Réalisme Social), Transit (1990 avec Claudia Messner & Rüdiger Vogler), adaptation d'un roman autobiographique d'Anna Seghers, retrace le périple de réfugiés fuyant, pour un bref moment, l'ombre menaçante de l'occupation nazie. Chez Paul Capita (voir Réalisme Social) on trouvera aussi des allusions aux guerres d'Algérie et d'Indochine.
En aparté, on citera Honoré de Marseille (voir aussi Protis-Films), une comédie musicale retraçant, sur le mode de la galéjade, la naissance de Marseille, de l'arrivée des phocéens à la confection de la bouillabaisse, ainsi que Les démons de l'aube (1946 ; avec Simone Signoret et Georges Marchal), un film d'Yves Allegret autour du débarquement en Provence où, pour les besoins de la production, Callelongue se voit transformé en douar algérien avec une mosquée et une minaret par le décorateur Wakhévitch.