Kill Bill : Volume 1
Réalisé par Quentin Tarantino
Avec : Uma Thurman, David Carradine, Daryl Hannah, Lucy Liu
Scénario : Quentin Tarantino
Titre Original : Kill Bill: Volume 1
Durée : 1:40
Pays : USA
Année : 2003
Site Officiel : Kill Bill : Volume 1
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Il existe différents types de réalisateurs dont les motivations diverses vont de faire de l'argent à divertir le public, raconter des histoires, bousculer le système, torturer nos méninges, transmettre un message ou faire de l'art voici quelques noms que vous pourrez à loisir remettre dans l'ordre qui vous conviendra : Julie Taymor, Oliver Stone, David Lynch, John Carpenter, Francis Ford Coppola, Takashi Miike, Michael Bay. Et puis, il y a Quentin Tarantino, un réalisateur qui fait des films pour son propre plaisir de spectateur.
Cinéphile par excellence, il a rendu un nouvel hommage au cinéma de genre, ramenant cette fois-ci le film d'arts martiaux et le western spaghetti sur nos écrans. S'il existe un film qui prouve que les réalisateurs sont de grands enfants à qui on laisse des jouets hors de prix pour qu'ils donnent vie à leur imaginaire, c'est bien Kill Bill. Tarantino a créé le film d'art martiaux ultime qu'il a toujours rêvé de voir. Le cinéaste y a mis toutes les scènes et les ingrédients assimilés au fil des ans lors d'interminables marathons durant lesquels il dévorait des centaines de séries B. Tout ceci se retrouve ici, sous la forme d'un best-of au calibre hollywoodien.
Le plaisir pris à voir ce film sera proportionnel au goût que vous partagez avec Tarantino pour les films d'arts martiaux des années 70, et à votre capacité à saisir les clins d'œil du cinéaste. Certains resteront sûrement hermétiques face à ce flot incessant de violence presque grotesque et à une intrigue qui se borne simplement à suivre la liste de cibles de La Mariée (The Bride), le personnage principal que campe Uma Thurman. Est-ce bien grave ? En fait, non, car à travers ce délire de cinéphile égocentrique, Tarantino atteint son but, à savoir : Toucher ceux d'entre nous qui ont soif de cinéma asiatique. Comme le Desperado 2 de son compère Robert Rodriguez, son film assume sa condition d'œuvre ultra-référentielle et évite du même coup l'écueil de la variation prétentieuse dans lequel tombait le Demonlover d'Olivier Assayas et sa reprise du Videodrome de David Cronenberg.
Uma Thurman ressemble à la lame de son katana. Son visage et son corps sont longs, froids et affûtés. L'actrice incarne son personnage d'héroïne d'action à la perfection, là où une Lara Croft ou certaines Drôles de Dames n'ont pas convaincu parce qu'elles restaient engoncées dans leur rôle de bimbos karatéka au lieu de s'attacher à développer l'aura de danger de leur personnage. Lucy Liu fait encore figure d'exception dans ce cas de figure, mais ce genre d'emploi devient tellement une habitude pour elle que l'on frise le cliché racial. Au niveau des personnages d'ailleurs, l'un des aspects du film qui risque de passer inaperçu, mais qu'il faut accorder à Tarantino, c'est qu'il fixe une faiblesse inhérente du cinéma d'action traditionnel. Au contraire des productions du genre, l'auteur prend le temps de développer le vécu de chaque ennemi de La Mariée sous forme de flash-back et leur insuffle une dimension humaine et faillible au lieu de les enfermer dans le stéréotype du « méchant. »
Les scènes de combat s'enchaînent, violentes et minutieusement chorégraphiées, entrecoupées de flash-back dans la plus pure tradition du western spaghetti. Elles empruntent leurs tons à une foule de genres et de films, y compris au cinéma d'animation. D'aucuns remarqueront avec intérêt que ce film illustre une nouvelle tendance du cinéma d'action contemporain : à l'instar de Matrix Reloaded, les séquences de combat empruntent à divers styles et les adversaires sont multipliés ad infinitum. On y verra la conséquence de l'émergence des jeux vidéo qui ont supplanté les films d'action des années 80 et les ont rendus obsolètes. Certains cinéastes ont compris que le monopole de l'action, que les ordinateurs et les consoles de jeux avaient récupéré de manière inattendue, pouvait être reconquis. Et le meilleur moyen d'y arriver restait de prendre l'adversaire à son propre jeu et à le surpasser.
La présence du sang, autre élément majeur de l'iconographie tarantinesque, est ici exacerbée. On pourrait s'inquiéter des penchants psychopathes du cinéaste devant de tels torrents d'hémoglobine. On y décèlera plutôt l'expression du plaisir sexuel, quasi-orgasmique qu'il ressent à submerger l'écran avec cette violence aux pulsions prsque enfantines.
A la fin de ce premier volume, Tarantino nous laisse suspendus, dans l'attente de l'indispensable second volume. Il le fait à la manière d'une série télévisée plutôt que sur le mode de l'histoire en plusieurs parties à la Matrix ou Star Wars. Il nous faudra donc attendre la fin du second volume pour comprendre et apprécier l'œuvre de Tarantino dans sa globalité : à suivre.
Fred Thom Traduit de l'anglais par Julien Duplan
Kill Bill : Volume 2
Inglourious Basterds
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