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Valse avec Bachir - critique du film
:. Réalisateur: Ari Folman
:. Acteurs: Serge Lalou, Gerhard Meixner
:. Scénario: Ari Folman
:. Titre Original : Waltz with Bashir
:. Durée: 1:30
:. Année: 2008
:. Country: Israel
:. Pays: Valse avec Bachir
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Le cinéma comme thérapie. Valse avec Bachir est un documentaire autobiographique d'animation, dont le titre fait référence à un soldat israélien pris sous les tirs de snipers à Beyrouth qui entame une danse de défi au milieu de la chaussée en crachant des rafales sous le regard des affiches représentant Bachir, dont l'assassinat a entraîné le tristement célèbre massacre de Sabra et Shatila, après l'invasion par les troupes israéliennes de Beyrouth Ouest en 1982. A la recherche de souvenirs enfouis, Ari Folman part à la rencontre de ses anciens compagnons d'arme, 20 ans après. Une quête qui, à travers les témoignages recueillis, réveille sa mémoire.
La grande originalité du film tient dans sa forme même. Le parti pris de l'animation permet d'éviter une succession d'interviews et l'insert de peu d'images d'archives (seule erreur du film, la présence effective de ces plans de cadavres à la fin, pour prendre inutilement en otage un spectateur conquis d'avance par le propos). Grâce à l'animation, le film explore l'imaginaire de la mémoire, incorporant au montage des scènes oniriques qui déréalisent la guerre du Liban, en adoptant le point de vue de ses acteurs et de ses témoins traumatisés par l'expérience de la violence, de l'absurde, de la mort. Une liberté créatrice et évocatrice servie par une mise en scène intelligente qui use autant des contre-jours, des ralentis, des accélérés, des surimpressions, des travellings et de la présence d'éléments du souvenir à l'arrière-plan du cadre. Autant de contamination du souvenir dans le présent qui rappelle ô combien la mémoire peut se montrer capricieuse lorsqu'elle se dérobe à la réalité et se confronte au poids du temps.
Ce qui frappe avant tout, c'est la technique employée : un mélange d'animation classique, flash et de 3D, le tout éclairé avec précision. Le film explore plusieurs palettes graphiques pour passer des scènes contemporaines à l'évocation de souvenirs incertains. Témoin, cette scène d'ouverture mettant en scène le rêve récurrent de l'un des personnages, poursuivi par tous les chiens qu'il a abattus à l'entrée des villages. Détaillée à l'extrême, elle multiplie les plans sur les gueules des bêtes lancées dans les rues, effrayant les passants, renversant les chaises des terrasses pour aboyer au pied d'un immeuble. Ou encore cette scène décrivant l'arrivée des soldats par la mer, embarqués sur un yacht sur fond du tube d'Orchestral Manœuvre in the Dark, « Enola Gay ». Les silhouettes des soldats en goguette envahissent le plan, les clairs-obscurs baignent les visages sous un ciel étoilé.
Pour autant, le dessin n'enlève rien à la violence décrite dans les différents récits. Les balles sifflent, le sang gicle, les corps s'effondrent, la peur et la perplexité se lisent sur les visages. Toute l'absurdité de la guerre appréhendée du point de vue de jeunes appelés et dont les enjeux les dépassent. Un discours qui forcément touche à l'universel, servi par des antihéros auquel le spectateur peut à sa guise s'identifier, un récit qui effleure la question des responsabilités de ce massacre et de l'implication d'Israël tout en restant prudemment dans le cadre de l'expérience personnel. Habile.
Moland Fengkov
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