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Leonera - critique du film
:. Réalisateur: Pablo Trapero
:. Acteurs: Martina Gusman, Elli Medeiros
:. Scénario: Alejandro Fadel
:. Titre Original : Leonera
:. Durée: 1:53
:. Année: 2008
:. Country: Argentine
:. Pays: Leonera
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On avait découvert ce réalisateur argentin en 2002 à Cannes, dans la section " Un certain regard ". Déjà, dans El Bonaerense (5e film à son actif), Pablo Trapero démontrait une grande maîtrise de mise en scène, choisissant le traitement quasi-documentaire d'un sujet de société, en l'occurrence le quotidien de la police de Buenos Aires. Le réalisateur est de retour une nouvelle œuvre tout en équilibre. L'histoire de Julia, enceinte de quelques semaines, se réveillant dans son appartement parmi deux corps meurtris, dont celui du père de son enfant à venir. Enfermée dans une prison pour jeunes mères en attendant son procès, où elle donnera naissance à Thomas, et dont elle devra se séparer après quatre ans.
Le cinéma de Trapero, servi par une photographie sophistiquée mais jamais clinquante et un sens du cadre extrêmement précis, sait jouer la discrétion de l'observateur objectif qui s'autorise néanmoins des élans de tendresse pour ses personnages. La caméra se place en retrait et laisse le temps s'étirer en douceur pour mieux capter le quotidien d'une vie carcérale. Lorsqu'elle s'approche davantage, c'est sans se déprendre de cette pudeur qui exclut tout voyeurisme. Au cours d'une visite pour préparer son procès, l'avocat de Julia lui déconseille de pleurer. Trapero semble inviter le spectateur à suivre ce conseil.
Le film évite tous les pièges du pathos dans lesquels un tel sujet aurait pu le précipiter. Pas de prise d'otage des sentiments, pas de jugement péremptoire, pas de manichéisme facile : les matons ne sont ni méchants ni bons, juste des employés d'une prison. Les détenues, qu'elles s'empoignent ou s'enlacent sous la douche, qu'elles déclenchent une mini-émeute ou qu'elles s'entraident, n'apparaissent ni comme des victimes de la société ni comme des paumées. De même, on ne peut maudire la mère de Julia (interprétée par une fragile Elli Medeiros) qui lui retire l'enfant, tant transparaissent dans ses actes, sur son visage, dans son discours, ses motivations et la détresse d'une mère esseulée.
Admirablement dirigés, les acteurs habitent leur personnage, Martina Gusman en tête, exprimant en un éclair une large palette de sentiments sur son visage, sur son corps, dans son regard que l'œil du réalisateur caresse avec douceur. Elle porte de bout en bout sur ses épaules Leonera et sert de guide perdu dans un univers régi par ses propres règles qui n'exclut pas celles du système D et de la survie. Ancré dans une réalité bien palpable qui renforce son crédit, le film tient sa ligne jusqu'à la dernière scène attendue (l'évasion vers une seconde chance) mais se jouant encore une fois avec brio des pièges des sentiments faciles. Une réussite.
Moland Fengkov
El Bonaerense
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