|
Hors Satan - critique du film
:. Réalisateur: Bruno Dumont
:. Acteurs: David Dewaele, Alexandra Lematre
:. Scénario: Bruno Dumont
:. Durée: 1:50
:. Année: 2010
:. Country: France
:. Pays: Hors Satan
|
Grand film que Hors Satan qui reprend à son compte et avec éclat la mystique d'un Bernanos (Sous le soleil de Satan) et le geste d'un Dreyer (Ordet). L'action se déroule dans la Manche. L'auteur de L'Humanité délaisse un temps ses terres de Flandres pour des paysages entre ciel et mer.
Le film s'ouvre sur un meurtre de sang froid. Un homme abat un agriculteur d'un coup de carabine. A ses côtés, une jeune fille - punkette gothique égarée dans un village nordiste- assiste à la scène. Quelques plans auparavant, elle confiait son profond désarroi au garçon, n'en pouvant plus de ce géniteur qui abusait, en tout état de cause, d'elle. Cette séquence liminaire, froide et dérangeante, scelle l'étrange lien qui unit ce couple atypique. Lui, marginal vivant dans un campement de fortune, elle pourvoyant à ses repas et lavant son linge.
Le duo se retrouve quotidiennement pour de longues balades. Entre les deux jeunes gens, le langage est rare mais les sentiments présents. Pourtant, leur relation reste platonique, sous l'impulsion du garçon. Contemplatif, tombant en prière devant la beauté fulgurante des paysages qui s'offrent à lui, est-il un saint ou un être maléfique, doté du pouvoir de guérison ? Pourquoi a-t-il tant à cœur de protéger celle à qu'il refuse un simple baiser ? Bientôt, la nature mystérieuse du garçon et ses desseins secrets se dévoilent, à l'occasion d'un drame inattendu.
Dans une inspiration proche de Pialat (difficile de ne pas voir dans le marginal une réminiscence de l'homme d'Eglise interprété par Depardieu dans Sous le soleil de Satan), Dumont reste fidèle à ses thèmes. Le sexe y est représenté, comme souvent, sans aménité. A ce titre, la scène avec une auto-stoppeuse entreprenante oscille entre grotesque et effroi, mais elle prépare surtout à accueillir le miracle d'une bouleversante résurrection.
La composition très picturale des plans ancre le récit dans une double dimension à la fois terrienne et divine. Chaque paysage vibre d'une puissance invisible. Une force transcendante déploie ses sortilèges, au sein même d'une mise en scène qui privilégie la simplicité évocatrice des plans. Le geste de Dumont gagne en intensité de film en film. Moins charnel, mais pour autant "incarné", son cinéma se fait moins provocateur, plus profond, ce qu'on avait déjà constaté avec le remarquable Hadewijch et qui se confirme avec Hors Satan, l'un de ses films les plus réussis.
Sandrine Marques
Flandres
Twentynine Palms
Festival de Cannes 2011
|
MAILING LIST
Get our reviews by e-mail
We'll never Spam you
|
|
|