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Le Guerrier Silencieux - critique du film
:. Réalisateur: Nicolas Winding Refn
:. Acteurs: Mads Mikkelsen, Maarten Steven
:. Scénario: Nicolas Winding Refn
:. Titre Original : Valhalla Rising
:. Durée: 1:40
:. Année: 2009
:. Country: Danemark
:. Pays: Le Guerrier Silencieux
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Ceci n'est pas un film de vikings. Ou plutôt, pas dans le sens classique, ou alors, au-delà de ce sens. Le Guerrier silencieux, titre purement informatif désignant le personnage principal et auquel on préfèrera le titre original, Valhalla rising, se regarde comme on entre dans une arène. Le spectateur entame une lutte contre et avec le film, une lutte qu'il doit accepter de perdre, au risque de passer complètement à côté. Si vous tentez de rationnaliser le film, il vous échappe. Il faut accepter de se laisser contrôler par ce qui s'apparente davantage à un trip hallucinogène, un poème métaphysico-tellurique, un voyage sensoriel et expérimental, entre Aguirre la colère de Dieu et 2001 l'Odyssée de l'espace.
A des années lumières des productions hollywoodiennes, Valhalla rising propose donc un voyage dans le temps et l'espace, divisé en trois étapes. La première met en scène un guerrier borgne que des clans font combattre dans une arène boueuse. Au cœur des montagnes hostiles de Scandinavie, ces combats se chargent d'une violence barbare rarement vue à l'écran. Sans concession, à la limite de la complaisance, le guerrier borgne et silencieux fracasse des crânes, rompt des nuques, mord et déchiquète des corps, avant de retourner dans sa cage et de finalement se libérer de ses maîtres, non sans avoir au préalable répandu des viscères sur le sol et planté une tête au bout d'une lance. Sa fuite le mène à la rencontre de vikings en partance pour Jérusalem. Débute alors un long voyage, interminable, au milieu d'une brume statique et sur une mer étale. Le film semble alors faire du surplace. Et c'est ce qui participe de sa force. Les plans se succèdent, s'étirent, sans jamais se déprendre de la tension qui les habite. Les personnages descendent un Styx sans réellement se mouvoir, comme dans un cauchemar. On comprend alors que le terminus ne sera pas la ville sainte, mais un au-delà entre l'enfer et le paradis. Le guerrier borgne, complètement habité par Mads Mikkelsen, dont nul ne connaît les origines, devient alors une sorte de guide mystique, l'allégorie d'un dieu, un monolithe effrayant qui mènera ses compagnons à leur funeste destinée. Car, alors que la soif et la faim finissent d'anéantir le moral de l'équipage, en proie à la folie, voici que se dévoile un paysage forestier et sauvage livrant les indices d'une présence autochtone peu accueillante. C'est ici la fin du parcours, là que le guide borgne devient humain en se sacrifiant, tel le prophète.
Servi par une bande-son organique, le film s'autorise des expérimentations visuelles, chromatiques et structurelles, confinant parfois à l'outrance, mais d'une maîtrise plastique impressionnante. Tout comme ses personnages, il emporte le spectateur vers un inconnu pour le laisser seul face à ses sensations. Car cette plongée dans le mysticisme exige du temps pour reprendre son souffle. On en sort imprégné, avec la désagréable mais vivifiante impression d'avoir vécu une réelle expérience de cinéma, un cinéma exigeant qui ne cède pas à la facilité du divertissement, mais qui déniche et éveille les émotions enfouies au plus profond de chacun.
Moland Fengkov
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